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  1. [nbpagination_toc="Introduction"] S’il existait une liste des rois de France méconnus, François II serait certainement en bonne position dans celle-ci. Son court règne (10 juillet 1559 - 5 décembre 1560) ne laisse guère de traces dans nos mémoires (en tout cas dans la mienne). Sa mère et régente Catherine de Médicis est par exemple une figure politique majeure de l’époque qui ne laisse guère de place à ses fils, hormis Henri III peut-être. Les règnes prestigieux de François Ier (1515-1547) et celui d’Henri IV (1589-1610) achèvent d’éclipser le court passage de François II à la couronne de France. Un petit règne certes, mais ces 18 mois d’histoire de France ne sont pas les plus paisibles de notre histoire, loin s’en faut ! La période du règne de François II est trouble, marquée par des crises politiques et religieuses majeures, préludes au déclenchement des guerres de religions ainsi qu’à l’affaiblissement de l’influence française en Europe au profit de l’Espagne. Sur le plan numismatique, cette affirmation de « l’inexistence » de François II est encore plus vraie, aucune monnaie n’étant frappée au nom du roi nouvellement monté sur le trône. Cette état de fait est toutefois à relativiser, car à la suite de son mariage avec Mary Stuart, reine d’Écosse (r.1543-1567), on retrouve un monnayage écossais original aux armes de France et d’Écosse sur lequel François porte le titre de roi de France et d’Écosse. Il s’agit là des seules monnaies portant le nom de François II. Je vous propose au travers de cet article de revenir sur l’histoire de ce roi du XVIème siècle, l’histoire de son temps et sur ses monnaies à la fois en France et en Écosse, qui tout en étant officiellement étrangères n’en demeurent pas moins un petit peu françaises… [nbpagination_toc="Accession au trône"] ACCESSION AU TRÔNE Né à Fontainebleau le 19 janvier 1544, François est le premier fils d’Henri II et de Catherine de Médicis. Portant le prénom de son grand-père François Ier, il devient Dauphin du royaume de France à la mort de ce dernier en 1547. Son père Henri accède alors au trône sous le nom de Henri II. François est fiancé dès l’âge de 4 ans à Mary Stuart, reine d’Écosse et petite fille de Claude de Lorraine, duc de Guise. Les noces seront célébrées le 24 avril 1558, François devenant au passage roi d’Écosse. Le contrat de mariage officialise le titre de roi d’Écosse de François qui détient des pouvoirs identiques à ceux de son épouse, ainsi que le rapprochement des deux royaumes qui lors de l’accession au trône de François doivent théoriquement être réunis sous la même couronne (et leurs sujets naturalisés de part et d’autre). L’Histoire en décidera autrement… © Collection du palais de Versailles Portrait du roi Henri II, François Clouet, 1559. Le règne du père de François, Henri II, est marqué par l’austérité : c’en est fini du faste de la cour de François Ier, des frivolités et des largesses pécuniaires. La période est également marquée par l’implantation durable des protestants et le début des querelles religieuses, malgré une certaine rigueur dans la répression envers les protestants. La puissance française en Europe se maintient, mais la fin de règne est marquée par plusieurs évènements défavorables, comme le traité du Cateau-Cambrésis (avril 1559) qui met un terme aux guerres d’Italie (initiées par Louis XII et poursuivies par François Ier) et aux espoirs français en Italie… Au cours d’un tournoi donné en l’honneur des mariages de sa fille Élisabeth de France avec Philippe II d’Espagne et de sa sœur Marguerite de France avec le duc de Savoie, Henri II est proprement embroché par la lance de son adversaire (le capitaine de sa garde écossaise, Gabriel de Montgommery) le 30 juin 1559. Après plusieurs jours d’agonie et de souffrance, Henri II meurt le 10 juillet suivant, François lui succédant au trône sous le nom de François II. Le tournoi fatal, ©wikipédia.fr, impression anonyme, XVIème siècle, Allemagne. [nbpagination_toc="Le règne de François II"] LE RÈGNE DE FRANCOIS II © Collection de la Chartreuse du Liget François II, artiste anonyme, XVIIème siècle Dès l’accession au trône de France de François II, le pays est en proie à une crise à la fois politique, financière et religieuse : Bien qu’âgé de 15 ans et légalement majeur, François II délègue (en accord avec sa mère Catherine de Médicis) une partie de ses pouvoirs aux oncles maternels de son épouse, les Guise, qui vont faire l’objet dans tout le royaume de profonds mécontentements : perçus comme d’ambitieux étrangers qui profitent des faveurs du roi, les Guise seront sans cesse en manque de légitimité et les principaux princes du sang (notamment Louis de Bourbon, Prince de Condé, et son frère Antoine de Bourbon, roi de Navarre) contesteront systématiquement leur mainmise sur le pouvoir ainsi que les mesures prises dans l’exercice de leurs fonctions. Le duc de Guise prend en main la destinée de l’armée royale tandis que son frère, le Cardinal de Guise, celle des finances, de la justice et de la diplomatie. Sur le plan financier, avec un déficit dépassant de loin les recettes annuelles de l’État, les Guise sont contraints de pratiquer une politique d’austérité draconienne : non-paiement des factures des fournisseurs de la cour, diminution des payes des militaires et officiers, diminution des effectifs de l’armée… Cela bien entendu n’arrange en rien leur côte de popularité, les choix effectués étant de plus empreint d’une certaine partialité… C’est la crise religieuse qui marquera le plus le règne du jeune roi. Le protestantisme est en effet en plein essor depuis le début du XVIème siècle et l’essor du luthéranisme puis du calvinisme. Lors de l’accession au pouvoir de François II, 10% de la population française est protestante (les « huguenots »), proportion qui monte à 30% dans la noblesse ! Poursuivant la politique de son père, François II durcit la répression envers les protestants : dès l’automne 1559 survient une grande vague de perquisitions, d’arrestations et de confiscations des biens. Les exécutions suivent de près, tout agitateur étant implacablement châtié. Cette politique répressive entraîne un groupe de gentilshommes à monter le projet de renverser le gouvernement des Guise et de confier le pouvoir aux princes du sang : c’est la célèbre conjuration d’Amboise. Les conjurés ont pour projet d’investir le palais avec le concours d’une importante troupe de huguenots et, tout en s’assurant de la sécurité du roi, d’éliminer les Guise au moindre signe de résistance de leur part. Mal organisée et mal préparée, la conjuration va se terminer en bain de sang. Des rumeurs de complot sont parvenues à la cour dès le mois de février 1560, ce qui a entraîné un revirement dans l’attitude du conseil royal (il est ainsi offert une amnistie générale aux protestants) mais il est hélas trop tard, les troupes rebelles convergeant de toute part vers le château d’Amboise où siège la cour. L’arrestation des principaux conjurés le 15 mars 1560 désorganise les troupes rebelles qui sont capturées une à une, mettant fin à tout espoir de renversement du gouvernement. Une ultime tentative sera menée par quelques centaines d’hommes le 17 mars suivant, mais ces derniers seront repoussés, poursuivis et massacrés, finissant pour certains pendus au grand balcon du château d’Amboise. La répression qui s’ensuivra durera plusieurs semaines et fera des centaines de victimes. Louis et Antoine de Bourbon ne devront leur salut qu’à l’absence de preuves envers leur personne, et pourront se réfugier dans le sud-ouest. ©wikipédia.fr Exécution des conjurés d’Amboise, gravure d’après Tortorel et Perrissin, XVIème siècle Devant le mécontentement général et après l’alerte de la conjuration d’Amboise, François II et ses conseillers, sur conseil de Marie de Médicis, renouent le dialogue avec les tenants du protestantisme, amorçant une politique de conciliation. Des premières mesures de clémence sont prises, permettant la libération des prisonniers pour fait de religion (édit de Romorantin en mai 1560). Les rassemblements protestants demeurent néanmoins interdits. La nomination d’un nouveau chancelier de France moins intransigeant, Michel de l’Hospital, va provoquer une tentative de rapprochement entre chrétiens de toute opinions, ce dont le Pape Pie IV ne veut initialement pas entendre parler. Devant le risque de tenue d’un concile national en France conte l’avis de Rome, le Pape accepte finalement l’ouverture d’un concile général tout en rejetant la participation des protestants… Un pas en avant, un pas en arrière… Sur le plan politique, le gouvernement tente d’obtenir l’appui de ses sujets. Mais devant le risque d’être évincés, les Guise refusent la tenue d’États Généraux, y préférant une consultation de la noblesse française. Cette dernière, tenue en août 1560, n’aboutit finalement à rien, si ce n’est à… une demande de convocation des États Généraux. Une nouvelle fois, l’affaire piétine… En province, ces atermoiements et la relative clémence envers le protestantisme incite les assemblées de protestants à se réunir, mettant à mal l’autorité royale. La tentative d’apaisement du pouvoir a finalement pour effet pervers de majorer les troubles dans le sud-ouest et le sud de la France. Les émeutiers, soutenus par la noblesse locale, s’attaquent aux symboles royaux et déclenchent localement de véritables insurrections durant l’été 1560 (l’ombre des Princes de sang, Condé et Navarre, n’est d’ailleurs pas bien loin dans l’organisation de ces révoltes). C’en est trop pour le roi qui envoie la troupe, et l’automne voit un semblant d’ordre se remettre en place. Les chefs rebelles sont en fuite, et le Prince de Condé, convoqué à la cour est arrêté en octobre 1560 et condamné à mort (bien que les sources sur ce dernier point divergent). Pour finir sur l’histoire du règne de François II, il convient d’évoquer les aspects internationaux finalement peu importants et dominés par l’application du traité de paix entre la France et l’Espagne : le traité du Cateau-Cambrésis, signé quelques mois avant l’accession au trône de François II (avril 1559) et qui met fin officiellement à plus de 40 ans de guerre entre français et espagnols. Ce traité entérine la renonciation à toutes les conquêtes françaises en Italie : la Savoie, le Piémont, la Toscane et la Corse, qui sont progressivement abandonnées non sans une certaine amertume. La récupération de quelques places fortes au nord-est du royaume, rendues (difficilement) par Philippe II d’Espagne ne compense pas vraiment ces pertes territoriales. C’est le début d’une diminution de l’influence française en Europe, au profit essentiellement de l’Espagne. Une dernière péripétie mineure marque le règne de François II : c’est la perte définitive de la colonie française au Brésil, détruite par les portugais en mars 1560, mettant fin à tout projet immédiat d’implantation dans cette région du monde. [nbpagination_toc="Monnaies françaises"] MONNAIES FRANCAISES Il convient de faire brièvement le point sur le système en usage sous François II, hérité du système mis en place par Henri II. Ce dernier a réformé dès 1547 la monnaie en France et abandonné de la frappe des écus d’or au profit de monnaies d’or avec portrait : les écus d’or dits « à l’effigie » puis en 1550 les « Henri d’or », avec ses multiples (double Henri d’or) et divisionnaires (demi Henri d’or). Le Henri d’or est émis pour une valeur de 50 sous tournois, avec un poids légèrement supérieur à l’ancien écu d’or. Contrairement au monnayage d’or, le monnayage d’argent a gardé les règles en usage sous François Ier. En ce qui concerne François II, il n’existe tout simplement pas de monnaies frappées à son effigie, ni même mentionnant son nom durant son bref règne : tous les modèles frappés sous le bref règne de François sont repris des types de Henri II. On retrouve ainsi les Henri d’or (avec son multiple, le double Henri d’or et son divisionnaire, le demi Henri d’or), les testons et demi-testons, les testons et demi-testons du Dauphiné, les douzains aux croissants et douzains aux croissants du Dauphiné. Il est bien difficile d’attribuer à tel ou tel roi une monnaie, les monnaies portant le millésime 1559 pouvant être attribuée à Henri II ou François II, tandis que celle portant le millésime 1560 peuvent attribuées à François II ou Charles IX (qui a fait frapper certaines monnaies du type de Henri II jusqu’en février 1561, tout en gardant le millésime 1560…). Rappelons par ailleurs qu’à l’époque, l’année commence seulement à Pâques et que le changement de millésime s’effectue dès lors vers les mois de mars ou d’avril. Dans cette apparente complexité, J. Duplessy nous précise toutefois que toutes les pièces au millésime 1560 sans différent d’atelier pointé semblent dater du règne de François II. Ci-dessous, quelques exemples de ce monnayage, pouvant (sans certitude absolue toutefois) être rattachée au règne de François II : Double Henri d’or L’exemplaire montré en exemple ci-dessus a été frappé à Rouen, en 1559. D’un diamètre de 28mm, pour un poids de 7,3 g, la monnaie représente à l’avers le buste cuirassé à droite d’Henri II, avec en légende (légende débutant à 7h) « HENRICVS. II. DEI. G. FRANCOR. REX. » (« Henri II, par la grâce de Dieu, roi des Francs »). Au revers de la monnaie, on trouve la représentation d’une croix formée de quatre H couronnées, cantonnée aux 1 et 4 d’un croissant, aux 2 et 3 d’un lys. La lettre d’atelier se situe au cœur de la croix (lettre B pour l’atelier de Rouen). En légende est inscrit « DVM. TOTVM. COMPLEAT. ORBEM 1559 » (« Pour qu'il remplisse l'Univers »), variante de la devise personnelle de Henri II. (Crédit image : ©wikipedia.fr) Teston Monnaie émise pour une valeur de 10 sous tournois, le teston présenté ci-dessus pèse 9,4g pour un diamètre de 29,5 mm. Il représente à l’avers le buste cuirassé d’Henri II tête nue, tourné vers la droite, avec en légende l’inscription « HENRICVS. II. D. G. FRANCO. REX » (« Henri II, par la grâce de Dieu, roi des Francs »). Au revers, on trouve un écu de France couronné et accosté de deux H couronnées. La lettre d’atelier se trouve à la pointe de l’écu (en l’occurrence le M pour l’atelier de Toulouse). La légende est celle qui est habituellement réservée au monnayage d’or : « XPS. VINCIT. XPS. REGNAT. XPS. IMPE » pour « Le Christ vainc, le Christ règne, le Christ commande ». Teston du Dauphiné Les testons dit « du Dauphiné » sont d’un graphisme similaire aux testons précédemment vus, l’écu de France du revers étant simplement remplacé par l’écu de France-Dauphiné. D’un poids de 9,1g pour un diamètre de 28mm, l’exemplaire ci-dessus a été frappé à Grenoble (lettre d’atelier Z). (Crédits ©monnaiedantan.fr) Douzain aux croissants Émis pour une valeur de 12 deniers tournois (d’où son nom de douzain), cette monnaie de billon présente à l’avers un Écu de France couronné, accosté de deux croissants également couronnés. En légende on retrouve la mention « +HENRICVS.2.DEI.G.FRANCORV.REX » (« Henri II, par la grâce de Dieu, roi des Francs »). Le revers représente une croix formée de 8 croissants, cantonnée de H en 1 et 3 et de couronnelles en 2 et 4, avec en légende « +SIT.NOMEN.DNI.BENEDICTVM. » (« Béni soit le nom du Seigneur »). Frappé en 1559 à Anger (lettre d’atelier F à la pointe de l’écu), la monnaie donnée en exemple pèse 2,5g pour un diamètre de 27,5mm). Ainsi, il n’existe pas en France de monnayage propre à François II, et il faut se tourner de l’autre côté de la mer du Nord pour trouver une trace numismatique de ce roi de France. [nbpagination_toc="L’alliance franco-écossaise"] L’ALLIANCE FRANCO-ÉCOSSAISE Comme nous l’avons précédemment cité, le roi François II est marié très jeune à la non moins jeune reine d’Écosse Mary Stuart, unissant les destinées de ces deux royaumes. Un petit retour en arrière est nécessaire afin de comprendre ce qu’il s’est passé. Fille de Jacques V d’Écosse et de Marie de Guise, petite fille du duc de Guise, Mary Stuart voit le jour à peine une semaine après le décès de son père, devenant aussitôt reine (elle est couronnée le 9 septembre 1543, à l’âge de 9 mois) sous le nom de règne de Mary Ière. La gestion du royaume n’est bien entendu pas confiée à la jeune reine : le comte d’Arran, puis sa propre mère, Marie de Guise, assureront la régence. © Victoria and Albert Museum Marie Stuart, reine d’Écosse, François Clouet, vers 1559 Alors que dans un premier temps, il est envisagé de marier la jeune Mary au fils d’Henry VIII d’Angleterre (traité de Greenwich du 1er juillet 1543), l’attitude belliqueuse des anglais qui n’ont de cesse de tenter de rattacher l’Écosse à leur royaume depuis bien longtemps, et l’attitude des meneurs écossais feront capoter le projet, Mary étant soustraite à l’influence anglaise. Le roi d’Angleterre prend aussitôt les armes contre l’Écosse, précipitant un retour des Écossais vers un de leur plus vieil allié : la France. Devant la perspective de destruction leur pays, le Parlement écossais renouvelle ses liens avec la monarchie française dès décembre 1543, et la naissance en 1547 de François, dauphin de France, permet d’envisager un mariage unissant les deux couronnes et le renouvellement de l’Auld Alliance (Alliance entre France et Écosse aux dépens de l’Angleterre, dont l’origine remonte possiblement à 1165, la première trace écrite datant de 1295). Le décès d’Henri VIII d’Angleterre en 1547 ne change pas la donne et les exactions se poursuivant en Écosse, le projet d’union est concrétisé par les fiançailles de Mary Stuart et de François II en 1548, provoquant l’envoi immédiat de troupes françaises en Écosse et la soustraction de la jeune souveraine écossaise aux multiples dangers la menaçant (enlèvement, meurtre…) par son envoi en France. Le mariage est célébré le 24 avril 1558 alors que François n’est pas encore roi de France et le contrat de mariage stipule formellement que le dauphin de France porterait le titre de roi d’Écosse, possédant d’ailleurs les mêmes pouvoirs que son épouse. Par la suite, à l’accession au trône de François, il est prévu que les deux royaumes soient réunis sous la même couronne, l’héritier mâle du couple pouvant seul prétendre à la succession de France (cette bonne vieille loi salique…), tandis qu’en cas de décès prématuré de Mary, la France mettrait sur le trône le plus proche héritier écossais. Il existe par ailleurs des clauses secrètes à ce contrat de mariage, la plus importante stipulant que l’Écosse et les droits écossais à la couronne d’Angleterre revendraient à la France en cas de décès de Mary sans héritier. © Bibliothèque Nationale de France François II et Marie Stuart, auteur anonyme, vers 1558 Durant cette période, royaume de France et royaume d’Écosse sont très proches l’un de l’autre, et lors de l’accession au trône de François II, Mary devient reine de France et d’Écosse. Demeurant en France auprès de son époux, c’est sa mère Marie de Guise qui continue d’assurer la régence en Écosse. Mais la position dominante de la France en Écosse ne plait pas à tout le monde : une partie de la noblesse protestante écossaise (les Lords de la congrégation, soutenus par l’Angleterre) se soulève et s’oppose à Marie de Guise, qui est chassée d’Édimbourg et doit se réfugier en la forteresse de Dunbar. Malgré le soutien apporté par François II à la régente, celle-ci décède en juin 1560, emprisonnée à Édimbourg, sans avoir pu recouvrer son pouvoir, même si les armées françaises ont plus ou moins rétablie la situation. La noblesse écossaise ne doit son salut qu’à l’intervention de la reine d’Angleterre Elisabeth Ière qui ne peut accepter de futures prétentions françaises à la succession du trône d’Angleterre et envoie l’armée faire le siège des troupes françaises dans le port de Leith. La ruine des finances françaises et les troubles en France forcent François II à négocier une paix désavantageuse : le traité d’Édimbourg de juillet 1560 établi le protestantisme comme religion d’État en Écosse, la reconnaissance d’Elisabeth Ière comme reine d’Angleterre et la renonciation de la France à tout ses droits sur la couronne écossaise. Les troupes françaises sont par conséquence expulsées d’Écosse. François II et Mary refuseront par ailleurs de signer ledit traité lorsqu’il leur sera présenté, ce qui en définitive n’influera guère sur le cours de l’histoire. [nbpagination_toc="Monnayage écossais et franco-écossais"] MONNAYAGE ÉCOSSAIS ET FRANCO-ÉCOSSAIS Durant une période d’environ 15 ans, royaume de France et royaume d’Écosse ont donc été étroitement liés. Il est dès lors logique de retrouver un monnayage écossais mentionnant François II comme roi de France et d’Écosse, pareille monnaie n’existant pas en France (comme nous l’avons vu précédemment, il n’existe en France aucune monnaie au titre de « François roi de France » ni « François roi de France et d’Écosse »). On retrouve trois monnayages écossais pour trois périodes distinctes : - la première période, où la reine Mary est fiancée au dauphin de France (1548-1558). - la seconde période (1558-1559), datant du mariage de François et Mary, avant l’accession au trône de François. Les deux époux sont dès lors roi et reine d’Écosse, dauphins de France. - La troisième et dernière période (1559-1560), ou nos deux protagonistes sont roi et reine de France et d’Écosse. PREMIÈRE PÉRIODE : 1548-1558 Le royaume d’Écosse émet en 1553 un monnayage d’or, qui célèbre à sa manière la promesse de mariage entre la reine Mary et François de France : il s’agit la pièce de 44 shillings. Pièce de 44 shillings 1553 La pièce est un parfait résumé de la situation politique de l’époque : on trouve à l’avers l’écu d’Écosse couronné, accosté des lettres « I » et « G » (pour « Iacobus Gobernator », « James Gouverneur ») rappelant que la régence du royaume est assurée à cette date par James Earl, comte d’Arran (Marie de Guise ne sera régente que l’année suivante). En légende, on trouve l’inscription « + MARIA. DE. GRA. R. SCOTORVM. » pour « Marie, par la grâce de Dieu, reine d'Écosse ». Au revers se trouvent les initiales imbriquées « M » (« Marie »), « F » (« François ») et « G » (« Guise »), encadrées de deux roses à cinq pétales, là aussi un parfait résumé de la gouvernance écossaise du moment. En légende circulaire, on trouve la mention « + DILIGITE IVSTICIAM » (« Respecter la Justice ») suivie du millésime 1553. Cette monnaie en or, émise pour 44 shillings (soit 2,2 livres) est frappée à Édimbourg et mesure 27 millimètres pour un poids de 5,22 grammes. (Crédits image : ©numisbids.com) Il s’agit là de la première mention de François (qui n’est pas encore roi ni en Écosse ni en France) sur une monnaie. Il n’y aura pas d’autre émission de monnaie évoquant le dauphin de France jusqu’à son mariage avec Mary d’Écosse en 1558. SECONDE PÉRIODE : 1558-1559 Ce monnayage écossais de 1558 et 1559 évoque le mariage de François et Mary, avant l’accession au trône de France de François : les deux époux sont dès lors roi et reine d’Écosse, dauphins de France. Il sera émis durant ces deux années un teston d’argent (appelé également gros), un demi-teston (ou demi-gros), un quart de gros en billon et une monnaie de billon noir, le lion. Toutes les monnaies sont frappées à Édimbourg. Teston d’argent 1558-1559 Le teston d’argent se retrouve avec les millésimes 1558 ou 1559. A l’avers, on trouve un écu brochant sur une croix, mi-parti, au 1 au contre-écartelé en a et d de France, en b et c du Dauphiné, au 2 d’Écosse ; mi-parti d’Écosse. La légende de l’avers devient « FRAN. ET. MA. D. G. R. R. SCOTOR. D. D. VIEN. » pour « François et Marie, par la grâce de Dieu, roi et reine d’Ecosse, dauphin et dauphine du Viennois ». Au revers on observe le monogramme FM sous une couronne accostée de deux croix de Lorraine, rappelant les origines Lorraine de la famille maternelle de la reine. En légende « +. FECIT. VTRAQVE. VNVM. » (« Nous ne faisons qu’un »). L’exemplaire ci-dessus, fabriqué en argent 917 millièmes, pèse 6,03g pour un diamètre de 28,5mm. (Crédits image : ©wikipedia.fr) Demi-teston d’argent Le demi-teston reprend les mêmes codes, aussi bien à l’avers qu’au revers. Le poids est bien évidemment inférieur, l’exemplaire ci-dessus pesant 3g pour un diamètre de 23,5mm. La monnaie est toujours fabriquée en argent 917 millièmes. (Crédits image : ©cgb.fr) Quart de gros d’argent En 1559 est frappé un gros d’argent qui célèbre plus spécifiquement le mariage de François et de Mary. Cette monnaie porte à l’avers le monogramme FM couronné, accosté à gauche d’un dauphin couronné et à droite d’un chardon couronné (symbole respectivement du Dauphiné et de l’Écosse). En légende se trouve la même mention que sur les testons et demi testons « + FRAN. ET. MA. D. G. R. R. SCOTOR. D. D. VIEN ». Le revers de la monnaie est plus original : un cartouche carré, accosté de deux croix de Lorraine et surmonté d’une croix potencée, comporte le texte suivant sur quatre lignes : « IAM. NON / SVNT: DVO / SED: VNA / .CARO. » (« Ils ne sont plus deux mais une seule chair »). En dessous du cartouche se trouve le millésime 1559. L’exemplaire présenté ci-dessous est fabriqué (toujours à Édimbourg) en billon et pèse 1,58g pour un diamètre de 21,5mm. Lion ou « hardhead » (hardi) en billon, 1558 à 1560 La dernière monnaie de cette période est le lion, appelé également Hardhead (qui est une déformation du Hardi français). Cette petite monnaie de billon noir (90% de cuivre, 10% d’argent) est frappée à partir de 1558. Il s’agit de l’équivalent du denier français. La monnaie est très petite (l’exemplaire ci-dessus pèse à peine 0,85g, le diamètre ne nous est pas parvenu) et comporte à l’avers le désormais habituel monogramme FM accosté de deux dauphins, avec une légende identique à celle des testons et gros vus précédemment. Le revers comporte un lion rampant couronné, avec en légende la mention « VICIT VERITAS » (« la vérité vainc ») et le millésime. On notera par ailleurs que deux essais, le premier en or, le second en argent furent frappés en 1558. Les deux essais représentaient à l’avers les profils face-à-face de François et Mary, avec en légende « FRAN ET MA DG RR SCOTOR DELPHIN VIEN » (« François et Mary, par la grâce de Dieu, roi et reine d’Écosse, Dauphin du Viennois ». Au revers de l’essai d’or se trouvait une croix formée de 8 dauphins, cantonnée de 4 croix de Lorraine, avec en légende « HORUM TUTA FIDES » (« leur fidélité est assurée »). Le revers de l’essai d’argent comporte quant à lui un écu couronné, parti de France, du Dauphiné et d'Ecosse, entre les lettres F et M couronnées et l'inscription « FECIT VTRA QVE VNUM » (« nous ne faisons qu’un »). Ces deux essais sont représentés ci-dessous (à gauche, l’essai en or ; à droite, l’essai en argent. Crédits photos : © numismatiquenice.eu) TROISIÈME PÉRIODE : 1559-1560 A la mort de Henri II, François devient roi sous le nom de François II. C’est l’occasion de sortir deux nouvelles monnaies en Écosse, les gros et demi-gros d’argent (ou teston et demi-teston). Ces monnaies sont globalement identiques aux testons frappés les années précédentes, et toujours fabriquées à Édimbourg. Gros d’argent On retrouve à l’avers l’écu couronné mi-parti de France et d'Écosse, accosté d'une croix et d'une croix de Saint-André. La légende a été légèrement modifiée pour devenir « +. FRAN. ET. MA. D. G. R. R. FRANCO. SCOTORS » (« François et Marie par la grâce de Dieu, roi et reine de France et d'Écosse »). Le revers comporte toujours le monogramme FM, mais cette fois accosté d’un lis et d’un chardon couronnés. En légende se trouve l’inscription « + VICIT. LEO. DE. TRIBV. IVDA. » (« Le lion de la tribu de Juda a triomphé »), le lion de la tribu de Juda étant une manière d’évoquer à l’époque Jésus Christ. La monnaie présentée ci-dessous pèse 5,9g pour 29 mm de diamètre. Le demi gros d’argent est identique, bien que d’un diamètre et d’un poids plus faible. Nous le présentons ci-dessous (Crédits photo : ©numisbids.com, mensurations inconnues) : Demi-gros d’argent L’exemplaire est intéressant par la contremarque apposée au revers, ce qui signifie que la monnaie a été réévalué de manière tout à fait officielle en 1578, bien après le décès de François II. Parallèlement à la frappe de ces nouveaux types monétaire est poursuivie la frappe du lion (ou hardhead) en billon, sur le même modèle que vu précédemment. La production de cette monnaie de billon sera arrêtée en 1560. Les monnaies de cette troisième période (à l’exception du lion en billon) sont les seules à être référencée par Jean Duplessy comme monnaies royales françaises, les précédentes monnaies frappées en Écosse l’ayant été alors que François ne porte pas encore le titre de roi de France. Il est à noter qu’après le décès de François II, la frappe des gros (testons) aux armoiries de France-Écosse sera poursuivie jusqu’en 1565, date du remariage de la reine d’Écosse, qui introduira de nouveaux types monétaires à cette occasion. [nbpagination_toc="Mort et postérité de François II"] MORT ET POSTÉRITÉ DE FRANCOIS II François II tombe malade en novembre 1560 après une partie de chasse, vers Orléans. Se plaignant de maux au niveau de l’oreille, il meurt le 5 décembre 1560, probablement des suites d’une otite surinfectée ou d’une méningite. Enterré à Saint Denis, François laisse peu de trace dans notre histoire : un roi adolescent et sans expérience, fragile aussi bien physiquement que psychologiquement, qui est essentiellement mentionné de nos jours comme « l’époux de Mary Stuart », cette dernière ayant acquis une renommée bien plus importante comme nous le verrons plus bas. Le règne de François II est surtout marqué par les troubles de plus en plus importants en catholiques et protestants, préfigurant les guerres de religion à venir. Mourant sans postérité, c’est son frère Charles âgé de 10 ans qui accède au trône sous le nom de Charles IX. Devant le jeune âge du roi, Catherine de Médicis est nommée régente du royaume (plus exactement « gouvernante de France »), affermissant sa prise en main du pouvoir en France. Au passage et après négociations avec la nouvelle régente, qui a besoin de l’influence des princes de sang face aux Guise, le prince de Condé qui attendait son exécution est gracié et libéré. © Fondation Bemberg Charles IX, roi de France, François Clouet, 1560-1572 [nbpagination_toc="Et Mary Stuart dans tout cela ?"] ET MARY STUART DANS TOUT CELA ? La mort de François II en décembre 1560 laisse Mary Stuart veuve à 19 ans. Elle négocie son retour en Écosse en tant que souveraine, retour qui est autorisé à la condition de ne pas chercher à rétablir le catholicisme. Ne prenant pas les rênes du parti catholique et tolérant largement les protestants, Mary déçoit dans un premier temps ses partisans, mais son mariage avec son cousin germain lord Darnley (un des chefs de file catholique) en 1565 lui attira également la désapprobation du parti protestant ainsi que de la reine d’Angleterre Elisabeth Ière. De cette union naquit un enfant né en 1566, Jacques. L’union sera éphémère car Lord Darnley, jaloux de l’amitié de Mary avec son secrétaire privé, fera assassiner ce dernier, puis changera d’allégeance complotant ouvertement contre son épouse. En 1566, Mary débute une liaison avec Jacques Hepburn, comte de Bothwell, son mari Lord Darnley trouvant quant à lui opportunément la mort dans des circonstances troubles en février 1567, jetant le discrédit sur la reine d’Écosse : cette dernière épouse en effet son amant récemment acquitté des charges d’assassinat envers Darnley. Cette union précipita l’assemblée d’une confédération de nobles écossais qui firent arrêter la reine, qui se retrouve emprisonné et forcée d’abdiquer au profit de son fils en juillet 1567. En mai 1568, Mary s’enfuie de sa prison du château de Loch Leven et lève une petite armée, battue quelques jours plus tard lors de la bataille de Langside. Mary est alors contrainte de s’enfuir en Angleterre, où elle est fraichement reçue par sa cousine Elisabeth Ière, qui la fait purement enfermer, en raison des prétentions de Mary sur le trône anglais. Un nouveau retour en arrière est nécessaire pour expliquer cette situation. Après les décès d’Henry VIII (en 1547), d’Edouard VI (en 1553) puis de Marie Ière d’Angleterre (en 1558) se pose un problème de succession : l’héritier direct issue de la lignée d’Henry VIII d’Angleterre n’est autre que Mary Stuart, reine catholique d’Écosse, récemment mariée au roi de France. Le rassemblement de l’Écosse, de l’Angleterre et de la France sous une même couronne est impensable, notamment pour Philippe II d’Espagne qui préfère intercéder en faveur d’Elisabeth Tudor, fille illégitime d’Henry VIII, qui monte sur le trône en novembre 1558. Ainsi lorsque Mary Stuart s’enfuie en Angleterre en 1568, Elisabeth Ière la perçoit comme une rivale, héritière proclamée du trône britannique, de confession différente et à même de satisfaire les espoirs de restauration de leur religion des catholiques anglais. L’emprisonnement sera long, Mary étant transférée de prison en prison afin d’éviter toute velléité de fuite ou de ralliement à sa cause. Après 18 ans de détention, Elisabeth est convaincue de l’existence de complots envers sa personne, plus ou moins rattachés à la personne de Mary Stuart et décide de se débarrasser de la reine déchue, à vrai dire bien encombrante. La conspiration de Babington en 1586 permettra d’incriminer l’ex-reine d’Écosse (cette dernière devait se voir offrir le trône d’Angleterre en cas de réussite de la conjuration). Les preuves quant à l’implication de Mary Stuart dans ce complot sont ténues et peut-être fabriquées de toute pièces (soit par les ennemis de Mary ou par les services d’Elisabeth Ière) mais quoi qu’il en soit, l’ex-reine d’Écosse est condamnée à mort et exécutée le 8 février 1587, par décapitation. Victime de la politique et des passions religieuses de l’époque, Mary Stuart repose ironiquement en l’abbaye de Westminster, à 10 mètres à peine du tombeau d’Elisabeth Ière. Elle reste la plus connue des souverains écossais en raison notamment de son tragique destin. ©Musée des beaux-arts de Valenciennes L’exécution de Marie Stuart, Abel de Pujol, XIXème siècle
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  2. LES ÉCUS "VERTUGADINS" DE LOUIS XV Louis XV accède au trône à la mort de son arrière-grand père Louis XIV (mort après un règne de 72 ans ! Le plus long de l’histoire française soit dit en passant) le 1er septembre 1715. Agé de cinq ans, le nouveau roi est bien entendu incapable de gouverner et son cousin Philippe d’Orléans exerce la régence jusqu’en février 1723. Durant les premiers mois du règne de Louis XV, on continue à frapper les écus aux trois couronnes hérités de Louis XIV (frappés depuis 1709 pour une valeur de 3 livres et demie), bien entendu au nom et au portrait du nouveau souverain (cette série d’écu aux trois couronnes – écu, demi-écu et quart d’écu – de Louis XV est par ailleurs excessivement rare, frappée uniquement à Paris, La Rochelle, Lille et Rennes). Par la déclaration du 14 décembre 1715, le régent ordonne l’introduction d’une nouvelle monnaie appelée « écu neuf » (ainsi nommé dans les textes de l’époque). Ce nouveau type monétaire sera fabriqué à partir de flancs neufs ou d’anciennes monnaies (généralement des écus aux trois couronnes ou leurs divisionnaires) refrappées au nouveau type. Ce procédé, appelé réformation, est d’un usage courant à l’époque : par soucis d’économie, on réforme les anciennes monnaies, c’est-à-dire que l’on surfrappe l’ancienne monnaie, sans prendre la peine de fondre ladite monnaie et de créer un flanc neuf (ce qui coute plus cher et prend plus de temps). De ce fait, la qualité des monnaies réformée est variable, le motif de l’ancien type pouvant rester visible sur certaines parties du flanc. L’écu neuf, qui prend vite le surnom de « vertugadin », peut être tenu comme étant la première monnaie de Louis XV, si l’on considère que l’écu aux trois couronnes est juste une réutilisation provisoire (avec modifications du portrait et des légendes) du type introduit sous Louis XIV. D’où vient ce nom « vertugadin » d’ailleurs ? Eh bien initialement de l’espagnol (verdugo, baguette) : le terme « vertugadin » servait à désigner au XVIème et XVIIème siècles une armature servant à faire bouffer une robe au niveau de la taille, lui donnant une forme de cloche. Par extension, le mot désignera les robes équipées de ce système ainsi que les chaises spéciales permettant de s’asseoir avec un tel vêtement d’une ampleur considérable. C’est à priori la forme ronde de l’écu de France qui vaudra ce surnom moqueur à la monnaie. Les robes vertugadin étant aussi surnommées « caches enfants », le portrait juvénile du roi sur la monnaie a peut-être également inspiré le surnom… En tout cas, plus jamais l’écu de France ne sera représenté en rond. Le surnom « vertugadin » restera en usage quant à lui pour ce type monétaire. Cette monnaie traine à l’époque une mauvaise réputation à cause de la mutation monétaire qui accompagna sa production : le régent Philippe d’Orléans ordonne que les écus neufs soient émis à la valeur de 5 livres alors que précédemment, l’écu d’argent était émis pour une valeur de 3 livres et demie. La mutation monétaire est une manière bien connue pour le pouvoir en place de faire rentrer de l’argent : quand les particuliers ramenaient leurs vieux écus aux trois couronnes valant 3 livres et demie, ils repartaient avec la même quantité de métal mais émise pour une valeur de 5 livres, la différence allant directement au trésor, au grand mécontentement de la population on peut se l’imaginer, la monnaie se voyant ainsi dévaluée de près de 40%. La monnaie présentée ci-dessus est frappé sur un flanc large, qui laisse apparaitre la quasi-intégralité du grenetis. Malheureusement, la monnaie a reçu un choc à 7 heures sans toutefois que cela n’altère trop l’aspect général de la pièce qui reste très agréable. D’un diamètre maximal de 42mm, pour un poids de 30,6 grammes (poids théorique : 30,6g.), la monnaie est en argent au titre de 917 millièmes, ce qui est le titre courant pour l’argent à l’époque. Cet écu réformé se reconnait tout d’abord à la présence d’une rose à cinq pétales sous le buste au droit qui est la marque spécifique de la réformation. Plus simplement, de façon subtile au droit, et nettement plus marquée au revers, on retrouve les traces de l’ancienne monnaie sur laquelle fut refrappé cet écu vertugadin : il s’agit en l’occurrence d’un ancien écu aux trois couronnes de Louis XIV (dont la date et le lieu de fabrication ne sont pas discernables) : on voit nettement la trace d’une couronne à 2 heures au revers de la monnaie. L’avers de la monnaie représente le buste enfantin de Louis XV tourné vers la droite, drapé et cuirassé. La légende est classique : « LVD. XV. D. G. FR. ET. NAV. REX » pour « Louis XV, par la grâce de Dieu, roi de France et de Navarre ». Le portrait est l’œuvre de Norbert Roëttiers, Graveur Général des Monnaies de 1704 à 1727. Au revers, on trouve un écu de France rond, couronné, avec en légende « SIT NOMEN DOMINI BENEDICTVM 1716 » (« Béni soit le nom du Seigneur »). La lettre d’atelier (A pour Paris, dans le cas présent) se situe à 6 heures, dans la légende. La tranche de l’écu est gravée « DOMINE SALVVM FAC REGEM » (« Seigneur, sauvez le Roi »), les mots étant séparés par des fleurons et des fleurs de lys. Comme sous les règnes précédents, les écus « vertugadins » (émis pour une valeur de 5 livres, 1 livre valant 20 sols) sont divisés en monnaies plus petites afin de faciliter la circulation et l’utilisation des espèces. Ces divisionnaires sont au nombre de 4 : les demi-écus (émis pour 2 livres et 10 sols), les quarts d’écu (émis pour 1 livre et 5 sols), les dixièmes d’écus (émis pour 10 sols) et les vingtièmes d’écus (émis pour 5 sols), ce qui représente au final une série de 5 monnaies : De gauche à droite (avec respect des proportions) : - Ecu vertugadin 1716 (atelier de Rouen) : diamètre 41mm, poids 30,5g (poids théorique : 30,6g). Frappé sur flanc neuf. - Demi-écu vertugadin 1716 (atelier de Paris) : diamètre 34mm, poids 15,1g (poids théorique : 15,3g). - Quart d’écu vertugadin 1716 (atelier de Troyes) : diamètre 30mm, poids 7,2g (poids théorique : 7,65g). - Dixième d’écu vertugadin 1717 (atelier de Poitiers) : diamètre 23mm, poids 3g (poids théorique : 3,06g). Frappé sur flanc neuf. - Vingtième d’écu vertugadin 1718 (atelier de Rennes) : diamètre 20mm, poids 1,40g (poids théorique : 1,53g). Toutes illustrations ci-dessus : ©monnaiesdantan.com Cette monnaie sera frappée dans tout les ateliers du royaume, de 1715 à 1718 (l’écu « vertugadin » connaitra une nouvelle mutation en 1718, la valeur de la monnaie passant de 5 à 6 livres). Ci-dessous la liste des ateliers ayant frappé l’écu vertugadin (écus frappés aussi bien sur flanc neuf que sur flanc réformés) : A : Paris AA : Metz B : Rouen BB : Strasbourg C : Caen D : Lyon E : Tours G : Poitiers H : La Rochelle I : Limoges K : Bordeaux L : Bayonne M : Toulouse N : Montpellier O : Riom P : Dijon Q : Perpignan S : Reims T : Nantes V : Troyes W : Lille X : Amiens Y : Bourges Z : Grenoble ϽϹ : Besançon & : Aix 9 : Rennes A partir de mai 1718, un nouveau type monétaire est mis en place : l’écu de Navarre, toujours émis pour la valeur de 6 livres mais pour un poids inférieur de 20% (environ 24,5g en lieu et place des 30,6g de l’écu vertugadin). Écu de Navarre, 1718, atelier de Paris. Poids 24,4 g, diamètre 38 mm. ©monnaiesdantan.com Bibliographie : - L’écu dit « au vertugadin » de Louis XV, rédaction de Monnaie Magazine, septembre 2018. - Les monnaies royales françaises 987-1793, par Arnaud CLAIRAND et Michel PRIEUR, éditions les Chevau-légers, 2008. - Les monnaies françaises royales de Hughes Capet à Louis XVI (987-1793), tome II (François Ier – Louis XVI), 2ème édition, par Jean DUPLESSY, éditions Maison Platt, 1999. - Monnaies royales de Louis XIII à Louis XVI 1610-1793, par Chantal BEAUSSANT, éditions de la Banque de France, 1987.
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  3. Introduction Notre étude s’est tout d’abord appuyée sur le recensement réalisé par BD-PAMOCH ; accessible sous le lien : http://bdpamoch.free.fr/p_c-serie.php?ID=7. Un travail immense a été réuni sur ce site et l’objectif est ici de rendre facilement accessibles les données produites dans BD-PAMOCH. Quelques modifications ont cependant été apportées à la description des monnaies dans le but de mieux les différentier. La carte de répartition de l’ensemble des bronzes à l’oiseau recensés est représentée schématiquement sur la Figure 1. On constate un déficit significatif d’émissions autour de Sens, la cité mère des Sénons. Les données réunies permettent de représenter l’aire de circulation des bronzes à l’oiseau. Cette aire dépasse significativement le territoire actuellement identifié des Sénons. On peut envisager que le territoire des Tricasses ainsi que celui des Sénons localisés au voisinage de la Seine corresponde à la zone de circulation la plus intense de ces monnaies et éventuellement à des zones d’émission importantes. Les peuples et les frontières étant imparfaitement connus, on peut envisager que la zone de circulation la plus intense de ces monnaies ne corresponde pas rigoureusement au territoire actuellement connu des Sénons. La carte serait cohérente avec une émission par des gaulois riverains de la Seine couvrant une partie des territoires Tricasses et Sénons. Une explication plausible serait que le territoire des Tricasses ait été une création augustéenne à partir des territoires originels des Sénons et des Lingons (voir Bibliographie, 1). La première classification de ces monnaies a été proposée par J. Piette à l’occasion d’une publication sur les fouilles partielles de Villeneuve-au-Châtelot (VAC). Nous appuierons nos descriptions sur cette classification qui repose sur environ 500 bronzes de types variés. Il est extrêmement difficile de produire une classification complète et celle proposée par Piette permet d’attribuer une classe à une immense majorité de monnaies y compris quand elles présentent des singularités (on peut dans ce cas leur attribuer une lettre de variante au sein de sa classe). Quelques monnaies résistent à cette classification et feront le bonheur des collectionneurs (comme par exemple les bronzes Giamilos SIINV sans la légende Giamilos ni torque devant le portait ou encore les nombreuses monnaies inclassables de la série XI). Une étude plus récente (voir Bibliographie, 3) a été menée par Bruno Foucray et Alain Bulard et s’est appuyée sur environ mille bronzes à l’oiseau dont 500 découverts principalement en fouilles lors des chantiers d’Archéologie Préventive. Les 500 autres monnaies, issues du sanctuaire de Villeneuve-au-Châtelot, représentent la moitié des bronzes à l’oiseau connus et faussent la vision du domaine de circulation quand elles sont utilisées pour cartographier la provenance des monnaies sans suffisamment de précautions. Bruno Foucray et Alain Bulard ont pris en compte ce biais, dans leur étude, pour analyser la répartition des monnaies. Il est aussi prévisible qu’après un temps suffisant des monnaies émises depuis un lieu donné diffusent et se répartissent de manière de plus en plus homogène sur son territoire de circulation. Ce second biais vient progressivement masquer le territoire d’émission. C’est la raison invoquée pour le déficit apparent de monnaies découvertes à Sens. La Seine ayant déjà donné leur nom aux Séquanes, peuple ayant ultérieurement émigré loin de la Seine, il a été envisagé que les Sénons doivent leur nom à un mot Indo-Européen signifiant « ancien » ayant donné le mot « senos » en gaulois et partageant ses racines avec le mot « sénile ». La toponymie est une science fragile et il nous semble que l’on ne peut pas exclure un lien avec la Seine comme pour les Séquanes. Les Sénons ont donné le nom actuel à la ville de Sens qui est généralement considérée comme la capitale des Sénons. Les bronzes étudiés présentent une épigraphie latine qui permet de dater leur circulation pendant la décennie précédant la guerre des Gaules. Traditionnellement leur émission est proposée entre -60 et -50 et peut-être même jusqu’aux premiers temps de la romanisation du territoire. 31 de ces bronzes à l’oiseau ont été retrouvés dans les fouilles d’Alésia, ces monnaies ont-elles été perdues comme de nombreuses autres par les Gaulois assiégés ? Leur épigraphie fait apparaitre les mots « SIINV » « YLLYCII » ou « YLLVCI » ou « INS » ou encore les noms « GIAMILOS » ou « KOIIACA ». Le double « II », apparaissant dans « SIINV » et dans KOIIACA » des monnaies gauloises se prononce « é », il apparait pendant la même période sur les deniers « IIPAD » ou « EPAD » des Arvernes. La lettre S apparait également sur certains des avers, mais aussi sur certains statères. Il semble, de ce fait, qu’une attribution de ce monnayage aux Sénons soit à favoriser. Leur territoire a-t-il évolué ? Figure 1: Aire de circulation des bronzes à l’oiseau, à partir de BD-PAMOCH, en traits orange et niveau de couleurs (orange foncé, forte circulation) – entouré de noir épais les territoires des : Carnutes, Sénons, Tricasses, Rèmes et Lingons d’après Jacques Lacroix1. L’oiseau représenté sur ces monnaies est-il : un aigle, un corbeau ou une corneille ? Nous ne le savons pas. Plusieurs éléments viennent nous interroger : les ailes sont parfois représentées sous la forme de stries le long du corps de l’oiseau (classe Ia, par exemple). Ceci suggère que le panache représenté systématiquement au-dessus de l’oiseau ne représente pas automatiquement les ailes du volatile. Il pourrait s’agir d’une évocation du mouvement des ailes lors de l’envol de l’oiseau. Certains bronzes présentent une urne sous le bec de l’oiseau. Il pourrait s’agir d’une urne funéraire. Dans ce cas, l’oiseau pourrait bien être un corbeau, l’une des représentations du dieu gaulois Lug responsable entre autres du voyage vers l’au-delà. Bien entendu, aucune certitude sur cette interprétation n'est possible. Les annelets centrés, les points, les pentagrammes, les esses, les croisettes aux extrémités bouletées restent également mystérieuses mais font écho à certains bronzes carnutes à l’aigle faisant apparaitre des symboles similaires. L’oiseau est-il un aigle de ce fait ? Des questions que nous laisserons sans réponse. Figure 2 : Quelques représentations de l’oiseau sur les bronzes des Sénons. Une classification des bronzes à l’oiseau Les différentes classes de monnaies ont été successivement décrites dans le Tableau 1, ci-dessous. Il existe de nombreuses sous-variétés de ces monnaies qui peuvent être repositionnées assez facilement dans cette classification. Nous n’avons pas pu disposer d’étude de caractérioscopie (analyse des correspondances des coins utilisés). Un tel travail permettrait de déterminer si un ou plusieurs ateliers sont à l’origine de ces émissions. Tableau 1 : Classification des bronzes à l’oiseau des Sénons. Ce tableau est téléchargeable ici au format TIF pour plus de lisibilité (22,36 Mo) : 3 Tableau classes de bronzes.tif Conclusion L’étude réalisée s’appuie sur trois sources principales dans le but de caractériser les différents types de bronzes à l’oiseau des Sénons. Les documents en support rassemblent des données très conséquentes et l’étude de Bruno Foucray et Alain Bulard apporte un nouvel éclairage sur ces monnaies. On ne peut que recommander la lecture directe de cet ouvrage qui couvre de nombreux autres aspects en dépit d’un prix assez modéré (50 euros, 631 pages et de nombreuses illustrations en couleur). Le travail qu’ont réalisé les auteurs de BD-PAMOCH est tout autant louable. Cette étude synthétise pour l’essentiel les travaux issus de ces deux sources et n’apporte pratiquement pas d’éléments nouveaux. L’objectif est de fournir des clefs simples d’identification des bronzes Sénons à l’oiseau. Le territoire des Sénons était structuré autour de deux agglomérations majeures, Sens et Melun, et des sanctuaires ou lieux de culte comme à Villeneuve-au-Châtelot ou à Lieusaint. La présence significative de cette monnaie en territoire tricasse est-elle le signe que les sanctuaires drainaient des pèlerins des peuples environnants ou plutôt que les Tricasses étaient en forte interaction économique avec les Sénons, ou même une partie du territoire des Sénons redécoupée sous Auguste ? On peut probablement opter pour les trois possibilités. Cette proposition est appuyée par le fait qu’il n’existe aucun type monétaire attribué spécifiquement aux Tricasses. Il semble exister plusieurs zones d’émissions associées aux différentes classes de monnaies. Il reste cependant un travail immense à conduire concernant la caractérioscopie pour s’assurer de l’existence effective d’ateliers indépendants plutôt que d’ateliers mobiles. Il reste aussi à lier ces monnaies aux bronzes des peuples environnants circulant pendant la même période (Meldes, Carnutes au moins) et faisant apparaitre aigles et autres oiseaux sur leur revers, mais aussi des pentacles ainsi que le bestiaire de la mythologie celtique : sanglier, cerf, serpent, aigle, corbeau. Peut-on envisager que ces monnaies s’inscrivaient dans un système monétaire plus global ? Bibliographie 1. Michel Kazprzyk, Cédric Roms, Anne Delo-Ahu, Cyril Dryard, « Troyes/Augustobona, Cité des Tricasses », Gallia, 72-1, pp. 247-260, 2015. 2. Jacques Lacroix, « Les frontières des peuples gaulois », Editions Yoran, 2021. 3. Bruno Foucray, Alain Bulard, « Monnaies Gauloises en bronze de l’Ile-de-France », Revue Archéologique d’Ile de France, 6ème supplément, 2020.
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  4. Unités de compte de la Kharouba et du Ryal en passant par la Piastre espagnole et le Nasri Hafside (Aspre) (Grandeur réelle: diamètre de 14mm) Figure 01 - Kharouba en argent (1/16 Ryal) frappée à Tunis en 1163 de l’Hégire (1749 JC) sous Ali 1 Bey (1735-1756) et le sultan Mahmoud 1 (1730-1754) – Poids de 1.3 g et diamètre de 14 mm - Réf. Anonyme. Face = Indications en arabe en deux lignes: «Sultan, Fleur tulipe / Mahmoud, Fleur tulipe»; globule au centre, grènetis à points, cercle. Revers = Indications en arabe en 3 lignes: «Dhuriba (frappé), 1163 de l’Hégire correspondant à 1749 JC / Fi (à) / Tunis», tulipe, globule au centre, grènetis à points, cercle. Observation: Il existe une autre variété de la Kharouba dont la date est en bas sur le revers. En créant la Kharouba en argent de valeur 1/16 Ryal (1/16 Piastre) et son demi, de valeur 1/32 Ryal (1/32 Piastre), ainsi que la monnaie de 1/8 Ryal (1/8 Piastre), Ali 1 Bey (1735-1756) a continué le processus d’élaboration du système monétaire en argent du Ryal (encore à l’état virtuel), entamé par son prédécesseur Hussein 1er Bey (1705-1735), le fondateur de la dynastie Husseinite. Auparavant, et depuis la conquête ottomane de Tunis en 1574, ce sont les Pachas, les Deys et les Beys Mouradites qui ont gouverné jusqu’à 1705. Le poids moyen de la Kharouba à sa création était d’environ 1.4 g et son diamètre avoisinant 14 mm. Quant au titre en argent, il était aux alentours de 440 g pour mille (Billon), en baisse par rapport à la période d’Hussein 1er Bey (1705-1735) dont les monnaies en argent, le ¼ Ryal (1/4 Piastre) et le Nasri (Aspre) (1/52 Piastre), titraient aux environs de 650 g pour mille (1). L’alignement de la régence de Tunis, province ottomane, ne l’oublions pas, sur le système monétaire ottoman du Kurus élaboré plutôt sous le sultan ottoman Soliman 2 (1687-1691), a été initié à Tunis en 1716 JC, non pas par l’émission du Ryal, conçu équivalent au Kurus ottoman et à la Piastre espagnole de poids moyen de 24 à 28 g, mais par l’émission du ¼ Ryal (Rubû Ryal) de poids moyen de 6 à 7g. L’iconographie adoptée pour le ¼ Ryal est celle du ¼ Kurus reproduisant sur sa face la fameuse citation ottomane « Sultan Al Barrayne Wa Khagane Al Bahrayne » traduite en « Sultan des deux terres et Khagane des deux mers ». (Grandeur réelle: diamètre = 24 mm) Figure 02 – Rubù Ryal (1/4 Ryal) en argent, frappée à Tunis en 1142 de l’Hégire (1728 JC) sous le sultan Ahmed 3 Ibn Mohamed (1703- 1730 JC) et Hussein 1er Bey (1705-1735 JC) – Poids de 6.1 g et diamètre de 24 mm – Anonyme. Face = Indications en arabe en 4 lignes: « /Sultan / Al Barayne Wa Khagane / Al Bahrayne Al Sultan / Ahmed [le reste du nom du sultan est indiqué sur le revers: Ibn Mohamed] ; 1142 de l’Hégire /» [Traduction = « /Sultan / des deux terres et Khagan / des deux mers, le Sultan / Ahmed; (1728 JC) /»]; globule au centre, cercle grènetis sous forme d’un petit trait répétitif (et non d’un globule). Revers = Indications en arabe en 4 lignes: « /Ibn Mohamed / Khan Izza Nasrou / Dhuriba Fi / Tounes / » [Traduction = « / Fils de Mohamed / Khan, honneur à sa victoire / Frappé à / Tunis»/»]; globule au centre, cercle grènetis sous forme d’un petit trait répétitif. La date est indiquée en bas de la face de la monnaie en chiffres arabes correspondant à 1142 de l’Hégire, équivalente à 1728 JC. Il est à noter que le chiffre 4 en arabe est souvent frappé sur les monnaies avec sa ligne du bas prolongée vers la gauche et parfois en continuant vers le haut Le Ryal tunisien, conçu équivalent à la Piastre et au Kurus, a été émis longtemps après ses subdivisions (1/32, 1/16 :Kharouba, 1/8, ¼, 1/2). Il ne sera émis que sous Ali 2 Bey (1759-1782) et demeurera à l’état virtuel durant une cinquantaine d’années depuis la création du système monétaire du Ryal en 1716 par Hussein 1er Bey (1705-1735). En plus, le terme Kurus (Kirch) adopté par la réforme ottomane en Turquie, n’a pas été adopté par la régence de Tunis comme c’est le cas pour la plupart des provinces ottomanes. Le terme Ryal lui a été préféré. L’ambiguïté qui en est résulté est la confusion du Ryal tunisien, équivalent à la Piastre de 8 Reaux, avec le Real espagnol, de valeur égale à 1/8 Piastre (1/8 Ryal). C’est pour cette raison que pour le distinguer, on lui a aussi attribué également la dénomination de Ryal Sebili. En interdisant la Piastre espagnole en 1714 avant d’entamer sa réforme monétaire du Ryal par l’émission en 1716 du Rubû Ryal (1/4 Ryal), le malin Hussein 1er Ben Ali (1705-1735) s’est servi de la matière en argent de la Piastre pour en fabriquer des Nasris (Aspre) en argent, sa principale monnaie marchande d’un poids d’environ 1g et de titre moindre de 650 pour mille. La belle affaire monétaire d’Hussein 1er Bey (1705-1735) est que la fusion d’une Piastre espagnole de 28 g en argent titrée 900 g d’argent pour mille, permettait d’émettre une quarantaine de monnaies de Nasris (Aspre) de poids moyen de 1g ou 5 monnaies de ¼ Ryal de poids moyen de 7g titrant 650 pour mille. Pour rappel, les monnaies composant le système monétaire espagnol basé sur la Piastre et ses subdivisions sont les suivantes: Piastre dénommée Real de Occo ou Peso en Amérique (8 Reaux*), 1/2 Piastre (4 Reaux), 1/4 Piastre (2 Reaux), 1/8 Piastre (Real: unité de compte espagnole), 1/16 Piastre (½ Real) et 1/32 Piastre (¼ Real). *Reaux : pluriel de Real. Après la défaite des espagnols et leur départ de Tunis en 1574, la Piastre espagnole et ses subdivisions sont demeurés en circulation légale jusqu’à leur mise à l’écart en 1714 JC. Durant cette période, la Piastre était admise comme l’unité de compte principale du système monétaire beylical malgré qu’elle porte sur son revers la croix chrétienne. (Grandeur réelle: aux environs de 4X3 cm) Figure 03 – Piastre espagnole en argent de 8 Réaux de forme particulière d’environ 4X3 cm, caractéristique des frappes en Amérique espagnole du 16ème siècle, poids de 26.6 g -– Réf. ARTmedina-tounes. (Grandeur réelle: aux environs de 2X2 cm) Figure 04 - Real en argent (1/8 Piastre espagnole) de forme particulière d’environ 2X2 cm, caractéristique des frappes en Amérique espagnole du 16ème siècle, poids de 4g – Réf. ARTmedina-tounes. Ce sont les divergences fratricides entre princes Hafsides qui ont permis à Charles Quint d’envahir Tunis la Hafside en 1535 et à l’Espagne d’y rester plus d’une trentaine d’années, avant de s’incliner en 1574 devant les troupes ottomanes conduites par Sinan Pacha. Cela correspondait à l’époque où les minerais argentifères gigantesques découverts en Amérique allaient permettre à la Piastre espagnole d’envahir le monde. La reine des monnaies, plus connue par la dénomination de Peso sur le nouveau continent découvert en 1492 par Christophe Colomb, avait un poids consistant d’environ 30 grammes d’argent et était simplement fabriquée par découpage de plaques d’argent, ce qui explique sa forme irrégulière. Ce processus de fabrication, qui a perduré jusqu’à la moitié du 17ème siècle avant l’apparition des machines de frappe, a engendré des formes particulières de la Piastre et ses subdivisions qui ont circulé partout dans les provinces espagnoles et ses territoires de conquête. Tunis la Hafside sous le « protectorat » espagnole de 1535 à 1574 a ainsi « bénéficié » de cette devise universelle qui a continué à circuler légalement à Tunis sous les ottomans jusqu’à sa mise à l’écart en 1714 au profit du Ryal beylical Husseinite. Durant le 17ème siècle synonyme de la période des Pachas, Deys et Beys Mouradites et à côté de la Piastre espagnole admise comme l’unité de compte principale de la régence de Tunis, c’est le Nasri (Aspre) en argent équivalent à 1/52 Piastre, d’origine Hafside et de forme carrée (parfois rectangulaire) qui s’est imposé comme unité de compte secondaire en argent et ce, jusqu’à la création de la Kharouba (1/16 Ryal équivalent 1/16 Piastre) par Ali 1er Bey (1735-1756) comme ci-dessus mentionné. (Grandeur réelle: cotes de 14 X 14 mm) Figure 05 - Nasri en argent (billon) sans indication de la date, du lieu et du gouvernant ce qui rend son attribution assez difficile, voire impossible. - Attribué à la période Hafside du 16ème siècle sur la base de ses cotes de 14X14 mm et ce, selon la méthode formelle d’attribution des Nasris par Monhel* - Les Nasris Hafsides ont été créés depuis le 13ème siècle et n’ont été écartés à Tunis qu’au début du 19ème siècle - Réf. ARTmedina-tounes ; monnaie transformée en pendeloque pour bijoux ethniques de Tunisie. *Méthode formelle développée en annexe 05 du cahier artistique ARTmedina-tounes n°03 « Système monétaire de la régence de Tunis 1574-1891 », Moncef Helioui, 2020, Amazon. Sans aucun doute, la Piastre espagnole, le Nasri (Aspre) Hafside, la Kharouba et le Ryal beylicaux sont des monnaies emblématiques du système monétaire de la Régence de Tunis sous la période ottomane de 1574 à 1891. Ils ont fait partie de la vie quotidienne des tunisiens durant plus de 3 siècles. Elles font partie intégrante du patrimoine culturel numismatique et archéologique de Tunisie. Un patrimoine numismatique riche, malheureusement délaissé sur le plan de la communication. Que dire alors de la promotion de la numismatique en Tunisie ? Un aspect de la réponse a été développé par l’auteur dans l’annexe 15 de son cahier artistique n°03 (2). Le dit cahier artistique n°03 s’est investi par ailleurs sur la clarification des dénominations et des valeurs des monnaies beylicales posant des problèmes de confusion. On confond encore le Nasri Hafside en argent, dénommé Aspre par les commerçants européens de l’époque, avec le Nasry d’Ahmed 1er Bey (1737-1755) que d’autres nomment Nasiri. Par ailleurs, on remarque souvent sur les catalogues de numismatique que l’attribution de la valeur monétaire se fait par rapport à la Kharouba, l’unité de compte secondaire. Même le Ryal, l’unité de compte principale, est mentionné par sa valeur de 8 Kharoubas. Malgré l’émission effective par Ali 2 Bey (1759-1782) du Ryal (équivalant à la Piastre), l’unité de compte principale du système monétaire beylical en argent depuis le début du 18ème siècle, la plupart des catalogues continuent à attribuer la valeur des monnaies beylicales non pas par rapport au Ryal, mais par rapport à la Piastre espagnole, l’unité de compte principale admise au 17ème siècle et écartée en 1714 JC. Ceci dénote certainement une preuve d’attachement et d’admiration à cette emblématique monnaie espagnole universelle qui a fait partie légale du système monétaire beylical de Tunis et qui a été tant partagée par les deux mondes de l’époque depuis la découverte espagnole de l’Amérique et ses gigantesques minerais argentifères. Monhel Références : 1 Abdelhamid Fenina, 2003, « Les monnaies de la régence de Tunis sous les Hussaynides, études de numismatique et d’histoire monétaire (1705-1891) », Tunis, 456 pages, 12 planches. 2 Moncef Helioui, 2020, Cahier artistique ARTmedina-tounes n°03 : « Système monétaire de la régence de Tunis (1574-1891) », Amazon, 344 pages, 182 figures. Prochains suivants : II : Système monétaire beylical de Tunis (1574-1891) – Unités de compte en cuivre III : Système monétaire beylical de Tunis (1574-1891) – Unités de compte en or
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  5. En Chine, le 20 août 1966, Mao Zedong appelle les Gardes rouges à détruire les "Quatre vieilleries" : les "vieilles idées", la "vieille culture", les "vieilles coutumes" et les "vieilles habitudes". Tout objet d'avant 1949 (prise du pouvoir par les communistes) et ayant le moindre lien avec la culture ou l'intelligence doit être détruit, parce qu'il est le produit d'une société non communiste. La détention de tels objets peut signifier la mort, selon le bon vouloir de l'équipe de Gardes rouges qui les découvre. Nous sommes dans les premières semaines de la "Grande révolution culturelle prolétarienne" qui durera dix ans et sera tant admirée en Occident. Un très grand nombre de monuments historiques est alors détruit, les livres et peintures brûlés en public, le corps de Confucius, mort depuis près de 2500 ans, sorti de la tombe et profané. Les statues de pierre sont brisées, celles en métal sont fondues ; la totalité des opéras, pièces de théâtre, films sont interdits et remplacés par huit ballets et opéras gouvernementaux. A peu près tous les établissements d'enseignement ferment. Quand ils rouvrent enfin, les cours de mathématiques, physique et chimie y sont supprimés, les connaissances devant se limiter à l'industrie et l'agriculture. Pendant plusieurs années, tous les livres sont interdits en-dehors des manuels d'industrie, d'agriculture et de ceux écrits par Mao et quelques-uns de ses proches. Les enseignants et tout lettré sont torturés en public ou en prison, et parfois mutilés et tués. Le cannibalisme d'humiliation se répand, soutenu par des bureaux locaux du Parti communiste. Pourtant, à l'échelle de la Chine, certains traverseront la tempête, parfois avec leurs collections... On ne sait pas toujours comment. Dans le Liaoning, au nord de la Chine, en 2009 et 2010, j'ai fréquenté assez longuement une Chinoise née au tout début des années 60. Son père lui avait appris à lire clandestinement pendant la Révolution culturelle avec les livres classiques qu'il cachait au péril de sa vie. Pour cette raison, elle est toujours la seule que je connaisse de sa génération à lire les idéogrammes traditionnels supprimés en 1964, après une première réforme très limitée en 1956. En 1976 Mao meurt, à partir de la fin 1977 il est permis de critiquer la Révolution culturelle et en décembre 1978, Deng Xiaoping amorce un net tournant vis-à-vis de l'époque maoïste. C'est alors que certains intellectuels et certains objets peuvent revenir au grand jour en Chine. C'est ainsi qu'en décembre 1979, "La Chine en construction", mensuel chinois en français destiné à la propagande en Occident, consacre un article non signé à la donation faite à l'Etat par un numismate de 73 ans, Qu Huichuang. Il collectionnait depuis les années 1920, à travers plusieurs décennies de guerre civile et d'invasion. "La Chine en construction", décembre 1979. Vous pouvez cliquer sur la photo pour l'agrandir et lire l'article. Cet "acte patriotique" lui vaut un certificat d'honneur et une prime de 8 000 yuans. C'est une belle somme : en 1972, le revenu annuel moyen d'une famille paysanne de 12 personnes (enfants inclus, et c'est avant la loi sur l'enfant unique) est de 1093 yuans dans la brigade de production qu'interroge Maria-Antonietta Macciocchi ; en 1981, un cheminot retraité perçoit 90 yuans de pension mensuelle, son salaire était de 120 yuans en fin de carrière, tandis que sa fille et son gendre dont les métiers ne sont pas précisés gagnent environ 100 yuans mensuels à deux ("La Chine aujourd'hui"); en 2009, dans une très grande ville je mangeais un repas pour 7 yuans. On voit par les photos illustrant l'article que la collection de Qu Huichuang semblait couvrir tout ce qui était chinois et en lien avec la monnaie, des monnaies archaïques à nos jours, et des billets médiévaux à nos jours en incluant les émissions des innombrables entités de la guerre civile, nationalistes inclus. L'article ne permet toutefois pas de savoir si les "gouvernements fantoches" collaborateurs des Japonais en faisaient aussi partie. 33sud évoque par exemple une curiosité de leur monnayage ici https://www.numismatique.com/articles/monnaies_11_11_11_11/monnaies-de-fibre-rouge-du-mandchoukouo-r33/ Il n'est pas aisé de trouver d'autres informations sur Qu Huichuang. Selon la base de données de l'American Numismatic Society, en 1985 il publie avec Wang Yicheng "A preliminary probe on currency theory of ancient China", dont l'existence est enregistrée sans autre information hélas. Et à l'été 2003, la lettre d'information de l'Oriental Numismatic Society signale l'hommage qui lui est rendu dans la revue chinoise "Zhongguo xianbi" de mars 2002 par trois de ses compatriotes, qui le qualifient de "one of China's greatest collectors of money" en lui attribuant comme dates "1903-1994". Cette date de naissance ne correspond pas à celle d'un homme qui avait 73 ans en décembre 1979, mais ceux qui connaissent la Chine ne s'en formaliseront pas. Cette recension affirme aussi que la donation de 1979 portait sur 10 000 pièces, tandis que l'article de 1979 la limite à 3 400. Je ne suis pas en mesure de savoir si la donation initiale a été complétée après la rédaction de l'article de 1979, ou si c'est la méthode de décompte qui a été modifiée. On voit dans l'article que les monnaies étaient présentées sur des feuilles qui pouvaient en compter parfois plus d'une dizaine ; 3 400 est-il le nombre de feuilles et 10 000 le nombre d'objets monétaires ? Quels que soient la date de naissance de Qu Huichuang et surtout le quantum de sa donation, on peut apprécier la rareté de l'évocation publique d'une numismatique en Chine à cette époque, et ce qu'ont représenté la constitution puis la préservation de cet ensemble à travers 50 ans de guerres et de persécutions. Et l'Histoire nous fait un clin d'oeil : Xi'an, la ville de Qu Huichuang, c'est aussi l'antique capitale des Zhou occidentaux, des Qin, des Han et des Tang, et c'est dans ses environs que se trouvent la tombe du Premier empereur et son armée en terre cuite. Bibliographie Ancient Chinese coins, site incluant une base de données issue de l'American Numismatic Society, site internet consulté en juin 2020 http://chinesecoins.lyq.dk/ANS_China_index_bibliografi.htm DAI Sijie, Balzac et la petite tailleuse chinoise, Gallimard – Paris, 2000 La Chine aujourd'hui, De la jeunesse à la retraite, collectif sous la direction de Fa Wen Bu, Beijing information – Beijing, 1983 La Chine en construction, décembre 1979, collectif sous la responsabilité de Soong Ching Ling, Centre des publications de Chine – Beijing, 1979 MACCIOCCHI Maria-Antonietta, De la Chine, Editions du Seuil – Paris, 1974 Oriental Numismatic Society, site internet consulté en juin 2020 http://orientalnumismaticsociety.org/JONS/Files/ONS_176.pdf Wikipédia
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  6. Salut, aujourd'hui j'ai décidé de vous offrir directement le premier chapitre de mon livre Autour de la monnaie romaine. (Pour recevoir la version intégrale cliquez ici . Une dernière chose, ce livre est gratuit, je vous le donne alors n'hésitez pas.) Je vais donc vous montrer comment identifier n'importe quelle monnaie romaine. Bien sûr plus vous avez de l'expérience plus c'est facile et inversement. Quoi qu'il en soit, je vais vous donner ci-après différentes méthodes pour l'identification des monnaies romaines. Même si vous êtes débutant, vous y arriverez. Aussi, si vous lisez cet article mais que vous vous intéressez à un autre type de monnaie, allez jusqu'au bout car certaines astuces pourraient vous servir. Bref assez parlé, passons au vif du sujet et surtout bonne lecture. Comment identifier une monnaie romaine ? La chose la plus importante dans la numismatique, c'est bien évidement l'identification des monnaies. Pour identifier une monnaie romaine, il y a plusieurs étapes : - déterminer le type (sesterce, denier, nummus, ...) - déterminer l'avers (empereur, impératrice, ...) - déterminer le revers (allégorie, animal, …) 1) Déterminer le type de monnaie Pour déterminer le type de la monnaie, identifiez d'abord le métal qui la constitue. Pour cela, un simple coup d’œil suffit. Si la monnaie est verdâtre/cuivrée, il s'agit d'une monnaie en cuivre ou en bronze. La couleur verte est causée pas l'oxydation du métal ou par la patine de la monnaie. Ensuite, si la monnaie est argentée ou légèrement grise, il s'agit d'argent ou de billon. Enfin, si la monnaie est dorée, vous êtes une personne chanceuse car il s'agira d'une monnaie en or. Une fois le métal déterminé, mesurez le diamètre de la monnaie. Par exemple, pour une monnaie en argent de 18mm, il s'agira d'un denier. Une fois le diamètre déterminé, pesez votre monnaie pour connaître son poids. Voici un tableau extrait de mon livre Les monnaies romaines en seulement 20 pages (Les poids qui vont suivre sont imprécis car ils ont varié au fil de la Rome Antique et au fil des siècles les monnaies ont perdu de leur poids). Le type La composition Le diamètre (mm) Le poids (gramme) L'aureus or 18/19 7/8g Le denier argent 18/19 3/4g Le quinaire argent 14/17 1,5/2g L'as cuivre 26 12g Le sesterce cuivre 28/36 15/25g L'antonien billon 20/23 2/4g Le nummus cuivre 17/20 2/3,5g Le follis cuivre 24/28 6/10g Le sillique argent 16/19 1,5/2g Le solidus or 20/21 4/4,5g Après avoir déterminer le type de votre monnaie, il faut déterminer le personnage sur l'avers de la monnaie. 2) Déterminer l'avers de la monnaie Cette étape pose problème si l'avers ne présente aucun personnage. En effet, certaines monnaies ont des animaux ou des allégories (représentation d'une idée comme la liberté, la fortune …) à la place de l'empereur ou de l'impératrice mais cette possibilité est plutôt rare. Si cette situation vous arrive et que vous avez par exemple une monnaie de type denier avec un éléphant figurant sur l'avers, il vous suffit de marquer « denier éléphant » sur internet et en cherchant dans les différentes images, vous n'aurez aucun mal à identifier votre monnaie. Je vous conseille d'utiliser internet car dans ces cas là, le nom de la personne ayant émise la monnaie n'est généralement pas indiqué, et il est donc difficile de chercher dans un livre car les personnages sont généralement classés par ordre alphabétique. De ce fait, il vous faut le nom de la personne pour trouver votre monnaie. Par exemple ici, si vous marquez « denier éléphant », vous tomberez sur cette monnaie. Il s'agit d'un denier de Jules César à l'éléphant. Vous savez donc déterminer une monnaie lorsque aucun personnage n'apparaît.Maintenant, voici comment déterminer le personnage présent sur l'avers de la monnaie. Pour déterminer le personnage sur la monnaie, il y a plusieurs possibilités : - lire la légende, - reconnaître l'empereur ou l'impératrice. Lire la légende La lecture de la légende est le moyen le plus sûr pour déterminer de quel empereur il s'agit, car comme beaucoup d'empereurs se ressemblaient, il est difficile lorsque l'on est débutant de les différencier et donc le risque d'erreur est parfois important. Ce déchiffrage est très facile. En effet, la plupart du temps le nom de l'empereur est écrit en toutes lettres avec à la fin du nom une terminaison à consonance latine. Par exemple, pour Antonin le Pieux, il sera écrit Antoninus Pius ou encore pour Commode, il sera écrit Commodus. Bien sûr, ici, il ne vous sert à rien de savoir la traduction du nom en français. Si vous marquez par exemple « denier Antoninus Pius », vous trouverez tout de même votre monnaie. Reconnaître l'empereur ou l'impératrice Reconnaître l'empereur ou l'impératrice visuellement est un bon moyen mais je le déconseille aux débutants car comme je l'ai dit précédemment, beaucoup d'empereurs se ressemblaient. Avec de l'expérience, on peut déterminer de quel empereur il s'agit au premier coup d’œil mais lorsqu'on est débutant la manière la plus simple est de prendre une liste de tous les portraits des empereurs et impératrices et de les comparer jusqu'à obtenir une ressemblance parfaite. Je vous conseille la liste des portraits dans le livre Die Münzen der römischen Kaiserzeit, (voir ici). 3) Déterminer le revers Voici la dernière étape : déterminer le revers. Pour déterminer le revers, il y a ici encore plusieurs possibilités suivant ce qui apparaît sur ce dernier. Il peut y avoir, des animaux, des objets, des allégories … S'il s'agit d'animaux, il suffit juste de reconnaître de quel animal il s'agit et voilà, l'identification est terminée. Pareil s'il s'agit d'un objet comme des instruments pontificaux, des galères (navires romains)... S'il s'agit d'une allégorie, vous pouvez reprendre les étapes de l'identification de l'avers car ici aussi, vous pouvez lire la légende. Par exemple, la Fortune devient « Fortuna ». Sinon, vous pouvez déterminer de quelle allégorie il s'agit par vous même mais si vous êtes débutant, je vous déconseille une fois de plus cette méthode bien qu'ici, ce soit plus facile que pour les empereurs. Par contre, si vous souhaitez vous entraîner à les reconnaître, je vous conseille une fois de plus le livre Die Münzen der romschen Kaiserzeit qui contient une liste de toutes les différentes allégories. En plus, vous avez la liste des portraits et la liste des allégories dans un seul et même livre. Dernier cas de figure, la légende ne correspond pas avec l'allégorie. Par exemple, l'allégorie est « Fortuna » mais la légende est « COS IIII » Ici, deux solutions s'offrent à vous. En effet, soit vous déterminez l'allégorie visuellement ou avec l'aide d'un livre, soit vous cherchez une monnaie ayant la même légende dans un livre ou sur internet et normalement, dans la description de la monnaie, le nom de l'allégorie correspondante sera spécifié. Voilà comment identifier une monnaie romaine. Maintenant, si vous avez des monnaies non identifiées près de vous, essayez les méthodes si dessus. Encore une dernière chose, voici une monnaie romaine que je vous laisse identifier. Marquez dans les commentaires si vous avez réussi à déterminer son type, l'empereur et son revers. Informations données : Poids : 10 g Diamètre : 28 mm Cet article est maintenant finit. Maintenant, entraînez vous et essayez de pouvoir identifier n'importe quelle monnaie au premier coup d’œil. De plus, vous pouvez désormais déterminer le prix des monnaies. D'ailleurs, j'ai écris un article à ce sujet. Si vous en voulez plus, cliquez ici pour recevoir le livre en entier (n'oubliez pas c'est gratuit, alors n'hésitez pas). Aussi, dîtes moi de quel sujet en rapport avec les monnaies romaines vous voudriez que je parle. Merci d'avoir lu cet article et n'oubliez pas d'aller voir mon blog empiredesmonnaies.fr si vous voulez plus d'article comme celui-ci. A bientôt !
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  7. [nbpagination_toc="Introduction"] Au travers de la monnaie ci-dessus, récemment acquise, je voudrais explorer les guerres d’Italie sous Louis XII. Si je connais comme tout le monde la bataille de Marignan et sa date 1515 (bien qu’il ne s’agisse plus de Louis XII mais de François Ier), c’est une période que je découvre totalement. Je vous propose donc un petit rappel historique du contexte de ces guerres d’Italie, afin de permettre de comprendre comment on en est arrivé à frapper des monnaies royales françaises dans le duché de Milan. [nbpagination_toc="Des origines des conflits italiens de 1494 - 1569..."] Des origines des conflits italiens de 1494 - 1569... Il existe en fait 11 guerres d’Italie qui ont rythmé la fin du XVème siècle, jusque dans la seconde moitié du XVIème siècle. Elles impliquent de nombreux états, le royaume de France bien entendu, mais également le duché de Milan, les royaumes de Naples, de Castille, d’Aragon, le Saint Empire, les États Pontificaux, la Confédération Helvétique et la République de Venise. Je retiendrais que celles qui intéressent directement le règne de Louis XII (c’est-à-dire les 4 premières). Il faut remonter au règne de Louis XI (r. 1461-1483) pour trouver l’origine de ces conflits, qui est comme fréquemment à cette époque un problème de succession : le royaume de Naples est jusqu’en 1442 aux mains de la maison d’Anjou. A cette date, le roi d’Aragon Alphonse V prend le contrôle du royaume de Naples. La maison d’Anjou n’a de cesse dès lors d’essayer de récupérer le royaume. A la mort de René d’Anjou en 1480, dernier représentant de la lignée, ses droits passent alors au roi de France Louis XI. Ce dernier n’a que peu d’intérêt à récupérer le royaume, mais son fils Charles VIII (r. 1483-1498) mettra bien plus d’ardeur à récupérer ce qu’il présente comme son dû. L’affaire est en elle-même bien plus complexe, car au-delà des gains territoriaux, il s’agit pour le roi de France de lutter contre l’alliance Florence / Milan / Naples, de s’allier au Duché de Milan pour freiner la puissance vénitienne. Il est également question de déposer l’actuel Pape Alexandre VI. Tout un programme on le voit ! Milan est d’ailleurs à la fois un objectif et un allié pour atteindre les buts fixés (on à l'esprit flexible côté alliance à l'époque...) ! Carte de l'Italie en 1494 [nbpagination_toc="La première guerre d'Italie (1494-1497) : une conquête éphémère"] La première guerre d’Italie (1494-1497) : une conquête éphémère Après s’être assuré la neutralité du roi d’Aragon et de Maximilien de Habsbourg grâce à certains arrangement territoriaux, Charles VIII entre en 1494 en Italie, à la tête d’une armée impressionnante. Les différents états traversé ne s’opposent pas aux français qui parviennent à Naples en février 1495. Cependant la résistance s’organise : le duc de Milan, le roi d’Aragon, l’empereur Maximilien, le Pape Alexandre VI et le République de Venise s’allient et coupent dès lors toute retraite aux français. La retraite s’effectue difficilement, mais la relative victoire des Français à Fornoue leur permet de poursuivre leur route vers le sud de la France. Le reste des troupes française, resté à Naples, résiste tant bien que mal, mais est finalement assiégé dans la ville d’Atella. Décimée par la maladie et la faim, l’armée fini par se rendre. La trêve d’Alcala de Henares, signée le 24 novembre 1497 entérine la fin de la première guerre d’Italie. La Bataille de Fornoue - gravure anonyme, 15è/16è siècle Charles VIII, n’ayant pas renoncé à ses prétentions italiennes, entretient néanmoins des intelligences avec certains princes d’Italie en vue de sa revanche, mais le roi meurt avant d’avoir pu mettre en œuvre ses projets. [nbpagination_toc="La deuxième guerre d’Italie (1499-1500) : le duché de Milan"] La deuxième guerre d’Italie (1499-1500) : le duché de Milan Succédant à Charles VIII, Louis XII (r. 1498-1515) reprend les prétentions de son prédécesseur et ajoute à ces dernières ses propres prétentions sur le duché de Milan qui avait été dirigé jusqu’en 1447 par la famille de sa grand-mère Valentine Visconti. De nombreuses alliances sont signées avec les États Pontificaux, la République de Venise, les cantons suisses, le royaume d’Angleterre et le futur roi de Castille. Le roi de France a les mains libres tandis que le duc de Milan Ludovic Sforza est totalement isolé. La campagne débute en juillet 1499 et Milan est occupé par les français dès le mois de septembre suivant. Gênes tombe également dans les mains des français au passage. Le duc de Milan s’est enfui et réfugié à Innsbruck. Ludovic Sforza, dit Ludovic le More Miniature de Giovanni Ambrogio de Predis Sous l’oppression française, la ville de Milan se révolte en janvier 1500, et le duc Sforza reprends la ville en février. Louis XII envoie alors ses généraux reprendre la ville, mais Ludovic Sforza est trahi par ses mercenaires suisses le 10 avril 1500 et est livré aux français. La ville retombe sous la coupe française et le restera pendant 12 ans. Le duc Sforza, quant à lui, finira ses jours incarcéré au château de Loches ou il décédera en mai 1508 (les causes du décès restant un peu obscures…). [nbpagination_toc="La troisième guerre d’Italie (1501-1504) : Objectif Naples !"] La troisième guerre d’Italie (1501-1504) : Objectif Naples ! Après cet intermède milanais, Louis XII se tourne vers Naples, non sans avoir au préalable obtenu et signé diverses alliance : avec le Pape tout d’abord, puis avec le roi Ferdinant II d’Aragon (Traité de Grenade, qui régit le partage du royaume de Naples. Un Yalta avant l’heure en quelque sorte…) En 1501, les français et les espagnols passent à l’attaque, forçant le roi de Naples à capituler dès septembre 1501. Le royaume de Naples est divisé selon les termes du traité de Grenade pour parti au français, pour parti aux espagnols. La ville de Naples reste aux mains françaises. Mais rapidement, des tensions entre les vainqueurs font jour, et entrainent un conflit entre les royaumes de France et d’Aragon, dès 1502. Les défaites françaises de Seminara, de Cérignole et du Garigliano entrainent la chute de Naples. Bataille de Cerignole :Goncalves de Crdoue regardant la dépouille de Louis d'Armagnac-Nemours œuvre deFederico de Madrazo y Küntz, musée du Prado En février 1504, l’armistice de Lyon est signé et voir le roi Louis XII renoncer à toute prétention sur le royaume de Naples. Les deux grands vainqueurs sont le royaume d’Aragon qui est désormais implanté à Naples et la Papauté qui a vu ses territoires s’accroitre (signalons au passage que le Pape Alexandre VI est mort durant le conflit. C’est le Pape Pie III qui lui succède pour quelques jours -26 très exactement- avant de mourir et d’être remplacé par Jules II). [nbpagination_toc="La quatrième guerre d’Italie (1508-1513) : patatras… Retour à la case départ…"] La quatrième guerre d’Italie (1508-1513) : patatras… Retour à la case départ… Même si Louis XII a renoncé en 1504 à ses vues sur le royaume de Naples, il reste implanté en Italie du Nord par sa possession du duché de Milan. Sous l’impulsion des États pontificaux, le traité de Cambrai (1508) débouche sur la quatrième guerre d’Italie, avec la papauté, le royaume de France et le Saint Empire associés contre la République de Venise. Le conflit débute en mai 1509. Rapidement, les alliés remportent les premières victoires et forcent les vénitiens à reculer en perdant quelques places au passage. Néanmoins, la puissance française effraie le Pape Jules II et en 1510, faisant preuve de grandes capacités de revirement (et de « plantage de couteau dans le dos », osons le dire…), il s’allie à Venise contre le royaume de France, afin de chasser les français du nord de l’Italie. Venise reprend peu à peu ses possessions sur la terre ferme. Le 5 octobre 1511 est formée la Sainte Ligue (incluant les États pontificaux, Venise, l’Espagne, l’Angleterre et la Suisse) dirigée contre les français. Ces derniers remportent une victoire à Ravenne en avril 1512, mais y perdent leur général Gaston de Foix-Nemours dans la lutte. Plutôt que de marcher directemet sur Rome, les français préfèrent perdre leur temps à piller la ville, laissant l’opportunité aux armées espagnoles et pontificale de se ressaisir. En juin 1512, les français sont chassés de l’Italie du Nord, y compris de milan ou Maximilien Sforza (le nom vous dit quelque chose ? C’est le fils du duc Ludovic évoqué plus tôt dans ce sujet…) est replacé sur le trône ducal. Malgré un sursaut français au printemps 1513 (qui permet de reprendre Milan quelques mois), les troupes françaises sont mises en échec lors de la bataille de Novare le 6 juin 1513 et doivent évacuer le nord de l’Italie. La mort de Gaston de Foix-Nemours à Ravenne Huile sur toile, State hermitage Museum Un nouveau danger menace en effet le royaume de France : l’Angleterre est passée à l’offensive en Picardie, les suisses avancent en Bourgogne et les espagnols sont entreprenant en Navarre. Après quelques défaites de ci de là, Louis II de la Trémoille, chef de guerre de Louis XII signe le 14 septembre 1513 le traité de Dijon qui voit l’abandon des prétentions françaises sur l’Italie. Néanmoins, le roi Louis XII refusera de ratifier le traité, ce qui laissera donc les coudées franches à son successeur François Ier (r. 1515-1547) et lui permettra de retourner guerroyer en Italie. Mais cela, c’est une autre histoire… [nbpagination_toc="Le gros royal de six sous"] Le « gros royal de six sous » Passons maintenant à la monnaie évoquée en début d’article, car oui, tout ce laïus n’a pour seul et unique but d’expliquer comment un roi de France en est arrivé à frapper une monnaie royale dans le duché de Milan ! En l’occurrence un gros royal de six sous. Gros royal de six sous, entre 1500 et 1512, atelier de Milan Poids 3,6g, diamètre 27mm, argent. Il s’agit d’une monnaie en argent reprenant un avers classique, à savoir l’écu de France couronné, accosté de 2 lys. La légende porte en guise de lettre d’atelier la tête de Saint Ambroise, suivie de l’inscription « ’LVDOVICVS’D'G'FRANCOR'REX' » pour « LOUIS, PAR LA GRACE DE DIEU, ROI DES FRANCS ». Le revers est plus intéressant à mon sens : il représente Saint Ambroise assis de face, tenant dans sa main gauche sa crosse d’évêque (Saint Ambroise fut évêque de Milan de 374 à 397) et dans sa main droite un fouet à trois queues. La légende dit qu’il aurait chassé les hérétiques ariens d’Italie avec ce fouet. Une autre variante ets qu'il serait apparu lors de la bataille entre les Scaliger et les Visconti pour séparer les combattants à l'aide de ce fouet. Le revers porte la légende « MEDIOLAN – I’DVX'ET'C’ » pour « DUC DE MILAN ETC. » [nbpagination_toc="Autres monnayage milanais..."] Double ducat d’or, entre 1500 et 1512, atelier de Milan Poids 6,91g, diamètre non connu, or Avers : +LVDOVICVS’D'G'FRANCOR'REX' (LOUIS, PAR LA GRACE DE DIEU, ROI DES FRANCS). Buste du roi à droite vêtu du manteau orné d’un lis et coiffé d’une couronne posée sur un chaperon. Revers : : MEDIOLANI’DUX. (DUC DE MILAN). Saint Ambroise à cheval, tenant le fouet dans sa main droite. A l'exergue, un écu de France couronné. © Vinchon.com Teston, entre 1500 et 1512, atelier de Milan Poids 9,32g, diamètre 28mm, argent Avers : +LVDOVICVS’D'G'FRANCOR'REX' (LOUIS, PAR LA GRACE DE DIEU, ROI DES FRANCS). Buste du roi à droite vêtu du manteau orné d’un lis et coiffé d’une couronne posée sur un chaperon. Revers : MEDIOLANI’DUX. (DUC DE MILAN). Saint Ambroise à cheval, tenant le fouet dans sa main droite. A l'exergue, un écu de France couronné. © Monnaiedantan.com Ces testons sont les premières monnaies françaises représentant le souverain régnant. Les ducs de Milan ont été les premiers à frapper des pièces à leur effigie (les testons, de l’italien testa, tête). Ces derniers connaissent un vif succès, et Louis XII, devenant duc de Milan en frappe à son tour. Gros royal dit Bissone, entre 1500 et 1512, atelier de Milan Poids 2,36g, diamètre 20mm, argent Avers : +LVDOVICVS’D'G'FRANCOR'REX' (LOUIS, PAR LA GRACE DE DIEU, ROI DES FRANCS). Ecu de France couronné, accosté de deux guivres couronnées. Revers : MEDIOLANI’DUX’ET’CET. (DUC DE MILAN ETC.). Pallium sous une couronnelle. © Monnaiedantan.com Soldino de Milan, entre 1500 et 1512, atelier de Milan Poids 1,15g, diamètre 20mm, billon Avers : +LVDOVIC'D.G.FRANCOR/REX'. (LOUIS, PAR LA GRACE DE DIEU, ROI DES FRANCS). Ecu de France couronné. Revers : MEDIOLANI’DUX’ET’C. (DUC DE MILAN ETC.). Croix feuillue. © Suffren-numismatique.com
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