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  1. Introduction Notre étude s’est tout d’abord appuyée sur le recensement réalisé par BD-PAMOCH ; accessible sous le lien : http://bdpamoch.free.fr/p_c-serie.php?ID=7. Un travail immense a été réuni sur ce site et l’objectif est ici de rendre facilement accessibles les données produites dans BD-PAMOCH. Quelques modifications ont cependant été apportées à la description des monnaies dans le but de mieux les différentier. La carte de répartition de l’ensemble des bronzes à l’oiseau recensés est représentée schématiquement sur la Figure 1. On constate un déficit significatif d’émissions autour de Sens, la cité mère des Sénons. Les données réunies permettent de représenter l’aire de circulation des bronzes à l’oiseau. Cette aire dépasse significativement le territoire actuellement identifié des Sénons. On peut envisager que le territoire des Tricasses ainsi que celui des Sénons localisés au voisinage de la Seine corresponde à la zone de circulation la plus intense de ces monnaies et éventuellement à des zones d’émission importantes. Les peuples et les frontières étant imparfaitement connus, on peut envisager que la zone de circulation la plus intense de ces monnaies ne corresponde pas rigoureusement au territoire actuellement connu des Sénons. La carte serait cohérente avec une émission par des gaulois riverains de la Seine couvrant une partie des territoires Tricasses et Sénons. Une explication plausible serait que le territoire des Tricasses ait été une création augustéenne à partir des territoires originels des Sénons et des Lingons (voir Bibliographie, 1). La première classification de ces monnaies a été proposée par J. Piette à l’occasion d’une publication sur les fouilles partielles de Villeneuve-au-Châtelot (VAC). Nous appuierons nos descriptions sur cette classification qui repose sur environ 500 bronzes de types variés. Il est extrêmement difficile de produire une classification complète et celle proposée par Piette permet d’attribuer une classe à une immense majorité de monnaies y compris quand elles présentent des singularités (on peut dans ce cas leur attribuer une lettre de variante au sein de sa classe). Quelques monnaies résistent à cette classification et feront le bonheur des collectionneurs (comme par exemple les bronzes Giamilos SIINV sans la légende Giamilos ni torque devant le portait ou encore les nombreuses monnaies inclassables de la série XI). Une étude plus récente (voir Bibliographie, 3) a été menée par Bruno Foucray et Alain Bulard et s’est appuyée sur environ mille bronzes à l’oiseau dont 500 découverts principalement en fouilles lors des chantiers d’Archéologie Préventive. Les 500 autres monnaies, issues du sanctuaire de Villeneuve-au-Châtelot, représentent la moitié des bronzes à l’oiseau connus et faussent la vision du domaine de circulation quand elles sont utilisées pour cartographier la provenance des monnaies sans suffisamment de précautions. Bruno Foucray et Alain Bulard ont pris en compte ce biais, dans leur étude, pour analyser la répartition des monnaies. Il est aussi prévisible qu’après un temps suffisant des monnaies émises depuis un lieu donné diffusent et se répartissent de manière de plus en plus homogène sur son territoire de circulation. Ce second biais vient progressivement masquer le territoire d’émission. C’est la raison invoquée pour le déficit apparent de monnaies découvertes à Sens. La Seine ayant déjà donné leur nom aux Séquanes, peuple ayant ultérieurement émigré loin de la Seine, il a été envisagé que les Sénons doivent leur nom à un mot Indo-Européen signifiant « ancien » ayant donné le mot « senos » en gaulois et partageant ses racines avec le mot « sénile ». La toponymie est une science fragile et il nous semble que l’on ne peut pas exclure un lien avec la Seine comme pour les Séquanes. Les Sénons ont donné le nom actuel à la ville de Sens qui est généralement considérée comme la capitale des Sénons. Les bronzes étudiés présentent une épigraphie latine qui permet de dater leur circulation pendant la décennie précédant la guerre des Gaules. Traditionnellement leur émission est proposée entre -60 et -50 et peut-être même jusqu’aux premiers temps de la romanisation du territoire. 31 de ces bronzes à l’oiseau ont été retrouvés dans les fouilles d’Alésia, ces monnaies ont-elles été perdues comme de nombreuses autres par les Gaulois assiégés ? Leur épigraphie fait apparaitre les mots « SIINV » « YLLYCII » ou « YLLVCI » ou « INS » ou encore les noms « GIAMILOS » ou « KOIIACA ». Le double « II », apparaissant dans « SIINV » et dans KOIIACA » des monnaies gauloises se prononce « é », il apparait pendant la même période sur les deniers « IIPAD » ou « EPAD » des Arvernes. La lettre S apparait également sur certains des avers, mais aussi sur certains statères. Il semble, de ce fait, qu’une attribution de ce monnayage aux Sénons soit à favoriser. Leur territoire a-t-il évolué ? Figure 1: Aire de circulation des bronzes à l’oiseau, à partir de BD-PAMOCH, en traits orange et niveau de couleurs (orange foncé, forte circulation) – entouré de noir épais les territoires des : Carnutes, Sénons, Tricasses, Rèmes et Lingons d’après Jacques Lacroix1. L’oiseau représenté sur ces monnaies est-il : un aigle, un corbeau ou une corneille ? Nous ne le savons pas. Plusieurs éléments viennent nous interroger : les ailes sont parfois représentées sous la forme de stries le long du corps de l’oiseau (classe Ia, par exemple). Ceci suggère que le panache représenté systématiquement au-dessus de l’oiseau ne représente pas automatiquement les ailes du volatile. Il pourrait s’agir d’une évocation du mouvement des ailes lors de l’envol de l’oiseau. Certains bronzes présentent une urne sous le bec de l’oiseau. Il pourrait s’agir d’une urne funéraire. Dans ce cas, l’oiseau pourrait bien être un corbeau, l’une des représentations du dieu gaulois Lug responsable entre autres du voyage vers l’au-delà. Bien entendu, aucune certitude sur cette interprétation n'est possible. Les annelets centrés, les points, les pentagrammes, les esses, les croisettes aux extrémités bouletées restent également mystérieuses mais font écho à certains bronzes carnutes à l’aigle faisant apparaitre des symboles similaires. L’oiseau est-il un aigle de ce fait ? Des questions que nous laisserons sans réponse. Figure 2 : Quelques représentations de l’oiseau sur les bronzes des Sénons. Une classification des bronzes à l’oiseau Les différentes classes de monnaies ont été successivement décrites dans le Tableau 1, ci-dessous. Il existe de nombreuses sous-variétés de ces monnaies qui peuvent être repositionnées assez facilement dans cette classification. Nous n’avons pas pu disposer d’étude de caractérioscopie (analyse des correspondances des coins utilisés). Un tel travail permettrait de déterminer si un ou plusieurs ateliers sont à l’origine de ces émissions. Tableau 1 : Classification des bronzes à l’oiseau des Sénons. Ce tableau est téléchargeable ici au format TIF pour plus de lisibilité (22,36 Mo) : 3 Tableau classes de bronzes.tif Conclusion L’étude réalisée s’appuie sur trois sources principales dans le but de caractériser les différents types de bronzes à l’oiseau des Sénons. Les documents en support rassemblent des données très conséquentes et l’étude de Bruno Foucray et Alain Bulard apporte un nouvel éclairage sur ces monnaies. On ne peut que recommander la lecture directe de cet ouvrage qui couvre de nombreux autres aspects en dépit d’un prix assez modéré (50 euros, 631 pages et de nombreuses illustrations en couleur). Le travail qu’ont réalisé les auteurs de BD-PAMOCH est tout autant louable. Cette étude synthétise pour l’essentiel les travaux issus de ces deux sources et n’apporte pratiquement pas d’éléments nouveaux. L’objectif est de fournir des clefs simples d’identification des bronzes Sénons à l’oiseau. Le territoire des Sénons était structuré autour de deux agglomérations majeures, Sens et Melun, et des sanctuaires ou lieux de culte comme à Villeneuve-au-Châtelot ou à Lieusaint. La présence significative de cette monnaie en territoire tricasse est-elle le signe que les sanctuaires drainaient des pèlerins des peuples environnants ou plutôt que les Tricasses étaient en forte interaction économique avec les Sénons, ou même une partie du territoire des Sénons redécoupée sous Auguste ? On peut probablement opter pour les trois possibilités. Cette proposition est appuyée par le fait qu’il n’existe aucun type monétaire attribué spécifiquement aux Tricasses. Il semble exister plusieurs zones d’émissions associées aux différentes classes de monnaies. Il reste cependant un travail immense à conduire concernant la caractérioscopie pour s’assurer de l’existence effective d’ateliers indépendants plutôt que d’ateliers mobiles. Il reste aussi à lier ces monnaies aux bronzes des peuples environnants circulant pendant la même période (Meldes, Carnutes au moins) et faisant apparaitre aigles et autres oiseaux sur leur revers, mais aussi des pentacles ainsi que le bestiaire de la mythologie celtique : sanglier, cerf, serpent, aigle, corbeau. Peut-on envisager que ces monnaies s’inscrivaient dans un système monétaire plus global ? Bibliographie 1. Michel Kazprzyk, Cédric Roms, Anne Delo-Ahu, Cyril Dryard, « Troyes/Augustobona, Cité des Tricasses », Gallia, 72-1, pp. 247-260, 2015. 2. Jacques Lacroix, « Les frontières des peuples gaulois », Editions Yoran, 2021. 3. Bruno Foucray, Alain Bulard, « Monnaies Gauloises en bronze de l’Ile-de-France », Revue Archéologique d’Ile de France, 6ème supplément, 2020.
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