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    Les écus "vertugadins" de Louis XV

    LES ÉCUS "VERTUGADINS" DE LOUIS XV

     

     

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    Louis XV accède au trône à la mort de son arrière-grand père Louis XIV (mort après un règne de 72 ans ! Le plus long de l’histoire française soit dit en passant) le 1er septembre 1715. Agé de cinq ans, le nouveau roi est bien entendu incapable de gouverner et son cousin Philippe d’Orléans exerce la régence jusqu’en février 1723.

     

    Durant les premiers mois du règne de Louis XV, on continue à frapper les écus aux trois couronnes hérités de Louis XIV (frappés depuis 1709 pour une valeur de 3 livres et demie), bien entendu au nom et au portrait du nouveau souverain (cette série d’écu aux trois couronnes – écu, demi-écu et quart d’écu – de Louis XV est par ailleurs excessivement rare, frappée uniquement à Paris, La Rochelle, Lille et Rennes).

     

    Par la déclaration du 14 décembre 1715, le régent ordonne l’introduction d’une nouvelle monnaie appelée « écu neuf » (ainsi nommé dans les textes de l’époque). Ce nouveau type monétaire sera fabriqué à partir de flancs neufs ou d’anciennes monnaies (généralement des écus aux trois couronnes ou leurs divisionnaires) refrappées au nouveau type. Ce procédé, appelé réformation, est d’un usage courant à l’époque : par soucis d’économie, on réforme les anciennes monnaies, c’est-à-dire que l’on surfrappe l’ancienne monnaie, sans prendre la peine de fondre ladite monnaie et de créer un flanc neuf (ce qui coute plus cher et prend plus de temps). De ce fait, la qualité des monnaies réformée est variable, le motif de l’ancien type pouvant rester visible sur certaines parties du flanc. L’écu neuf, qui prend vite le surnom de « vertugadin », peut être tenu comme étant la première monnaie de Louis XV, si l’on considère que l’écu aux trois couronnes est juste une réutilisation provisoire (avec modifications du portrait et des légendes) du type introduit sous Louis XIV.

     

    D’où vient ce nom « vertugadin » d’ailleurs ? Eh bien initialement de l’espagnol (verdugo, baguette) : le terme « vertugadin » servait à désigner au XVIème et XVIIème siècles une armature servant à faire bouffer une robe au niveau de la taille, lui donnant une forme de cloche. Par extension, le mot désignera les robes équipées de ce système ainsi que les chaises spéciales permettant de s’asseoir avec un tel vêtement d’une ampleur considérable. C’est à priori la forme ronde de l’écu de France qui vaudra ce surnom moqueur à la monnaie. Les robes vertugadin étant aussi surnommées « caches enfants », le portrait juvénile du roi sur la monnaie a peut-être également inspiré le surnom… En tout cas, plus jamais l’écu de France ne sera représenté en rond. Le surnom « vertugadin » restera en usage quant à lui pour ce type monétaire.

     

    Cette monnaie traine à l’époque une mauvaise réputation à cause de la mutation monétaire qui accompagna sa production : le régent Philippe d’Orléans ordonne que les écus neufs soient émis à la valeur de 5 livres alors que précédemment, l’écu d’argent était émis pour une valeur de 3 livres et demie. La mutation monétaire est une manière bien connue pour le pouvoir en place de faire rentrer de l’argent : quand les particuliers ramenaient leurs vieux écus aux trois couronnes valant 3 livres et demie, ils repartaient avec la même quantité de métal mais émise pour une valeur de 5 livres, la différence allant directement au trésor, au grand mécontentement de la population on peut se l’imaginer, la monnaie se voyant ainsi dévaluée de près de 40%.

     

     

     

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    La monnaie présentée ci-dessus est frappé sur un flanc large, qui laisse apparaitre la quasi-intégralité du grenetis. Malheureusement, la monnaie a reçu un choc à 7 heures sans toutefois que cela n’altère trop l’aspect général de la pièce qui reste très agréable. D’un diamètre maximal de 42mm, pour un poids de 30,6 grammes (poids théorique : 30,6g.), la monnaie est en argent au titre de 917 millièmes, ce qui est le titre courant pour l’argent à l’époque.

     

    Cet écu réformé se reconnait tout d’abord à la présence d’une rose à cinq pétales sous le buste au droit qui est la marque spécifique de la réformation. Plus simplement, de façon subtile au droit, et nettement plus marquée au revers, on retrouve les traces de l’ancienne monnaie sur laquelle fut refrappé cet écu vertugadin : il s’agit en l’occurrence d’un ancien écu aux trois couronnes de Louis XIV (dont la date et le lieu de fabrication ne sont pas discernables) : on voit nettement la trace d’une couronne à 2 heures au revers de la monnaie.

     

    L’avers de la monnaie représente le buste enfantin de Louis XV tourné vers la droite, drapé et cuirassé. La légende est classique : « LVD. XV. D. G. FR. ET. NAV. REX » pour « Louis XV, par la grâce de Dieu, roi de France et de Navarre ». Le portrait est l’œuvre de Norbert Roëttiers, Graveur Général des Monnaies de 1704 à 1727.

    Au revers, on trouve un écu de France rond, couronné, avec en légende « SIT NOMEN DOMINI BENEDICTVM 1716 » (« Béni soit le nom du Seigneur »). La lettre d’atelier (A pour Paris, dans le cas présent) se situe à 6 heures, dans la légende.

    La tranche de l’écu est gravée « DOMINE SALVVM FAC REGEM » (« Seigneur, sauvez le Roi »), les mots étant séparés par des fleurons et des fleurs de lys.

     

    Comme sous les règnes précédents, les écus « vertugadins » (émis pour une valeur de 5 livres, 1 livre valant 20 sols) sont divisés en monnaies plus petites afin de faciliter la circulation et l’utilisation des espèces. Ces divisionnaires sont au nombre de 4 : les demi-écus (émis pour 2 livres et 10 sols), les quarts d’écu (émis pour 1 livre et 5 sols), les dixièmes d’écus (émis pour 10 sols) et les vingtièmes d’écus (émis pour 5 sols), ce qui représente au final une série de 5 monnaies :

     

     

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    De gauche à droite (avec respect des proportions) :

    - Ecu vertugadin 1716 (atelier de Rouen) : diamètre 41mm, poids 30,5g (poids théorique : 30,6g). Frappé sur flanc neuf.

    - Demi-écu vertugadin 1716 (atelier de Paris) : diamètre 34mm, poids 15,1g (poids théorique : 15,3g).

    - Quart d’écu vertugadin 1716 (atelier de Troyes) : diamètre 30mm, poids 7,2g (poids théorique : 7,65g).

    - Dixième d’écu vertugadin 1717 (atelier de Poitiers) : diamètre 23mm, poids 3g (poids théorique : 3,06g). Frappé sur flanc neuf.

    - Vingtième d’écu vertugadin 1718 (atelier de Rennes) : diamètre 20mm, poids 1,40g (poids théorique : 1,53g).

    Toutes illustrations ci-dessus : ©monnaiesdantan.com

     

    Cette monnaie sera frappée dans tout les ateliers du royaume, de 1715 à 1718 (l’écu « vertugadin » connaitra une nouvelle mutation en 1718, la valeur de la monnaie passant de 5 à 6 livres).

     

    Ci-dessous la liste des ateliers ayant frappé l’écu vertugadin (écus frappés aussi bien sur flanc neuf que sur flanc réformés) :

     

    A : Paris

    AA : Metz

    B : Rouen

    BB : Strasbourg

    C : Caen

    D : Lyon

    E : Tours

    G : Poitiers

    H : La Rochelle

    I : Limoges

    K : Bordeaux

    L : Bayonne

    M : Toulouse

    N : Montpellier

    O : Riom

    P : Dijon

    Q : Perpignan

    S : Reims

    T : Nantes

    V : Troyes

    W : Lille

    X : Amiens

    Y : Bourges

    Z : Grenoble

    ϽϹ : Besançon

    & : Aix

    9 : Rennes

     

    A partir de mai 1718, un nouveau type monétaire est mis en place : l’écu de Navarre, toujours émis pour la valeur de 6 livres mais pour un poids inférieur de 20% (environ 24,5g en lieu et place des 30,6g de l’écu vertugadin).

     

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    Écu de Navarre, 1718, atelier de Paris. Poids 24,4 g, diamètre 38 mm. ©monnaiesdantan.com

     

     

     

     

    Bibliographie :

    - L’écu dit « au vertugadin » de Louis XV, rédaction de Monnaie Magazine, septembre 2018.

    - Les monnaies royales françaises 987-1793, par Arnaud CLAIRAND et Michel PRIEUR, éditions les Chevau-légers, 2008.

    - Les monnaies françaises royales de Hughes Capet à Louis XVI (987-1793), tome II (François Ier – Louis XVI), 2ème édition, par Jean DUPLESSY, éditions Maison Platt, 1999.

    - Monnaies royales de Louis XIII à Louis XVI 1610-1793, par Chantal BEAUSSANT, éditions de la Banque de France, 1987.

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